Elle était à l’agonie depuis longtemps, sa mort vient d’être annoncée (1). Nous espérions que la main de l’homme n’aurait pas à intervenir et qu’elle serait « partie » de façon naturelle emportée par un caprice fou de la nature ; sa disparition aurait peut être été plus facile à accepter.

Cette chapelle a une histoire très particulière puisqu’elle a été édifiée en 1890 par Henry Ducos de la Hitte marié avec Marie d’Aignan, en mémoire de leur fils unique « Jean » décédé en 1876 à l’âge de 15 ans.

La famille du Cos apparait dès 1080 dans le cartulaire de Sainte Marie d’Auch. En 1147 donation leur est faite du château de la Hitte ; à dater de cette époque les nobles du Cos sont qualifiés de : seigneur de la Hitte. La lignée des Ducos de la Hitte fait partie de ces quelques nobles familles qui ont gravé leurs noms dans l’histoire de Monfort. Elle s’implanta à la fin du 17° siècle par le mariage de Jean de la Hitte avec Marguerite de Thomas d’Argèle qui avait des possessions à Monfort. Depuis cette époque et jusqu’au début du 20° siècle la famille est présente à Monfort et y joue un rôle important puisque par deux fois un de ses membres sera élu maire. La famille habite le village, rue d’Embonneau (n°21), puis en 1810 Jean Baptiste Ducos de la Hitte achète le domaine d’Esclignac, ainsi que les métairies du Lauzéro et d’En Merlet.

Par nos archives nous connaissons assez bien l’histoire de cette chapelle, Une concession de 66m2 a été achetée en 1889 pour la somme de 2970 fr et c’est l’architecte Jaworsky qui fut chargé d’en dessiner le plan d’une superficie de 54m2 ; il en fit un petit chef d’œuvre néo gothique de finesse et d’élégance tout en respectant l’intégralité du symbolisme chrétien. L’entreprise Trillon d’Auch en entreprit la construction en 1890.

Vitrail du chœur.

La chapelle possède une crypte où reposent : A droite – Henry Ducos de la Hitte, Marie d’Aignan sa femme, Jean leur fils. A gauche – Jean Baptiste Ducos de la Hitte, Marie Cugnac sa femme, parents d’Henry et Jean Marie Philibert Ducos de la Hitte petit neveu d’Henry qui a été le dernier a y être inhumé en 1967. A gauche de l’entrée de l’édifice une excavation sert d’ossuaire et contient les dépouilles les plus anciennes des membres de la famille ré-inhumées à cet endroit. Ne souhaitant plus l’entretenir la famille de la Hitte la cède à la commune en 1997 ainsi qu’une somme d’argent à charge pour elle de la sauvegarder. Depuis cette époque et malgré le souhait de la municipalité de conforter le monument celui-ci à continué à se détériorer.

Les vitraux sont d’une excellente facture, saisissants de beauté, de finesse et de couleur, ils ont été exécutés par un peintre verrier de grande renommée : Gustave Pierrre Dagrant propriétaire d’une importante entreprise à Bordeaux. Au moment de la construction de cette chapelle, l’entreprise est à son apogée.

Détails des vitraux du chœur :

Saint Jean Baptiste annonçant la venue de Jésus.

Présentation de Jésus au Temple accueilli par Siméon et la prophétesse Anne

Saint Jean-Baptiste baptise Jésus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Prédication de Saint Jean-Baptiste.

Décapitation de St Jean Baptiste à la demande de Salomé.

La production de cette société est importante puisque l’atelier a équipé environ 3000 édifices, tant publics que religieux, en Europe et en Amérique du Sud. G.P Dagrant a notamment réalisé les vitraux pour le chœur de l’église de Bayonne, pour la chapelle Notre Dame de l’Espérance à Bordeaux, pour l’académie Espagnole de langue à Madrid. Il expose de très nombreuses verrières exécutées en France et en Espagne, il travaille régulièrement en Italie et a Rome. La loi de séparation de l’église et de l’État, puis la grande guerre ralentissent la production et la seconde guerre mondiale donne un coup fatal à cette maison qui sera la dernière du genre et qui survivra jusqu’en 1951. Ce sera alors la fin d’un atelier dont le rayonnement est difficile à imaginer aujourd’hui et qui met en lumière la valeur de ce mobilier.

Comme nous le disions plus haut, cette chapelle attirait le regard par la finesse de sa décoration dont voici quelques détails :

Un des deux « œil de bœuf » éclairant le chœur.

Un des huit chapiteaux différents des colonnes supportant les quatre clés soutenant la voute.

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette chapelle faisait partie intégrale du paysage Monfortois ; des générations s’y sont rendues jusqu’aux années 1970 pour assister à la messe et rendre hommage à leurs morts, le 2 Novembre.

Simone Mauruc-Gallenne (2)


(1) Bien qu’inscrite à l’inventaire des monuments, cette chapelle a été détruite le premier trimestre de 2017. Il ne reste que la base du chœur comme témoignage de cette très belle chapelle.

(2) Simone Mauruc-Gallenne est native de Monfort. La famille Broqueville l’avait déjà rencontrée en 2001 lors notre célèbre visite à Monfort. Elle avait préparé avec feu Robert Lagardère la venue de la famille dans son berceau d’origine. Depuis lors, Simone et moi, nous nous croisons par archives interposées. Actuellement nous essayons de nous voir une fois par an à Monfort au mois d’août pour partager notre passion commune, les archives de la bastide. C’est avec grand bonheur que je lui partage ce blog pour qu’elle y fasse part de ses découvertes dans les archives.