Comme vous le savez, il est très difficile de retrouver la vie politique de Charles, notre ministre, avant sa nomination comme Chef de Cabinet du gouvernement belge. C’est en cherchant dans les journaux du Gers que je retrouve des bribes et morceaux de ses engagements politiques.

Ainsi je suis dans la lecture de La Voix du Peuple 1 pour trouver un journaliste qui cite son nom tout à la fin d’un articulet qui paraît sans intérêt. Il s’agit d’une rencontre de la Conférence interparlementaire pour la paix qui s’est déroulée le 8 août 1897 à Bruxelles. Visiblement, il y avait des parlementaires de plusieurs pays qui y participaient. Charles de Broqueville en faisait donc partie. Somme toute, il s’agit plus d’un entrefilet qui vaut son pesant d’or.

Cette information peut paraître anodine dans une feuille de chou de quatre pages publiée à Auch, mais l’on est en réalité dans les balbutiements de la future conférence internationale pour la paix qui se déroulera à La Haye en 1899. C’est en cherchant sur Internet pour comprendre pourquoi une conférence interparlementaire sur le sujet de la paix existait à cette époque là.

Et va s’en dire que Broqueville se targue de mettre le favoritisme aux oubliettes dans l’armée belge. Il s’est fendu d’une note de mise au point quant aux avancements réclamer par certains militaires et qui font le siège de son bureau pour être nommés à un plus haut poste ! 2

De la guerre de 1870 à la paix

En 1870 se déclenche la guerre franco-allemande qui va précipiter la chute du second empire et la naissance de la IIIe République. Les bruits de bottes se font entendre dans toute l’Europe alors que l’on est en train de chercher la paix. L’idée est alors de réunir les parlementaires et les chefs d’État pour voir comment les États pourraient garantir une paix durable. J’ai trouvé un texte du Professeur Rik Coolsaet de Département des Sciences politiques de l’Université de Gand. Ce texte est très éclairant sur le rôle de chacun dans la recherche de la paix. En tout cas, Broqueville, en tant que parlementaire, est un ardent défenseur d’une proposition du Tsar Nicolas II à propos de l’organisation d’une telle conférence. 3

De la paix à la violence

Plusieurs années plus tard, le même journal, La Voix du peuple 4, nous révèle qu’un ouvrier flamand de la ville de Gand a fait un attentat contre un prêtre de 55 ans dans le parc de Bruxelles, en 1912. En visant un prêtre, c’était une forme déguisée pour s’attaquer aux ministres catholique et plus particulièrement Broqueville et Carton de Wiart. Ce forcené a expliqué que la veille il aurait bien tiré au révolver sur les deux ministres. Notre ministre a donc échappé à deux attentats, dans sa vie. 5

Décidément on parle de paix, de violence et de guerre… et de décès. Parce que le monde est ainsi fait. Dans un numéro plus ancien, celui du 20 janvier 1895, le journal conservateur, La Voix du Peuple annonce le décès de Louis de Broqueville (1829-1895). Il est le dernier des Broqueville français qui trépasse ainsi dans son château d’Esparbès. Cette annonce est intéressante car on découvre qu’il est membre du Parti conservateur 6, fortement engagé pour la cause monarchiste contre l’implantation de la IIIe république. Il était donc engagé dans parti politique monarchiste et catholique. Paradoxalement, son neveu, Charles, né en Belgique fait partie d’un parti qui pourrait ressembler au Parti conservateur. Mais il n’en est rien. Charles est en fait un démocrate chrétien. Il était donc plus de gauche que son vieil oncle français. Le part catholique belge rassemblait une large palette d’opinion de droite jusqu’à la démocratie chrétienne.

Et même la Révolution française y passe

Quoi de plus normal pour un journal conservateur 7 que de cracher sur la République. Ainsi un valeureux journaliste a découvert dans les archives de Monfort une description parcellaire des œuvres pies dont Monfort s’était fait une spécialité dans les temps anciens. Ainsi l’on découvre la Confrérie du Chapelet fondée au XVIIe siècle par l’abbé Mazars. Les familles nobles et riches de la contrée se sont empressés de donner de l’argent à cette confrérie. Tout à la fin de l’article, je découvre par deux fois mon patronyme. Ainsi, il y avait la Fondation Louis-Marie de Broqueville (1784-1864) avec un capital de 700 francs ainsi qu’une autre Fondation de Broqueville, Solirène, d’Aspe, Marqué qui avait placé un capital de 8100 francs ! Cette seconde fondation est probablement constituée par le même Louis-Marie. En effet, il est marié avec Louise Basilide Marguerite d’Aspe (1803-1876).

Voilà pour la Voix du peuple, journal politique du Gers. Avec un tel nom, il y a de quoi avoir des doutes concernant son orientation politique.

Géry de Broqueville

  1. La Voix du peuple 9 aout 1897. Texte dans l’entête de cet article. ↩︎
  2. La Voix du peuple du 7 avril 1914. (30967) ↩︎
  3. Prof. dr Rik Coolsaet, La Belgique et la Première Conférence de la Paix de La Haye (1899), Université de Gand, 2000, (30961) ↩︎
  4. La voix du Peuple du 15 août 1912 (30964) ↩︎
  5. Le second attentat se déroulera au pied de la Colonne du Congrès, en octobre 1929. Là c’était Le Prince de Piémont qui avait été visé par un anarchiste italien. Charles était à ses côté au moment de cette attaque. ↩︎
  6. En France, dans la première moitié de la Troisième République, les conservateurs, quelque fois qualifiés de « réactionnaires » par leurs adversaires, sont des opposants monarchistes au régime républicain. Plus de précisions en cliquant ici ↩︎
  7. La Voix du peuple du 14 mars 1910. (30966) ↩︎