par Géry de Broqueville | Juin 27, 2010 | Histoire

La maison au fond à un étage est le lieu de naissance de Charles de Broqueville
Est-ce une analyse des milieux de vie de Carolus, un homo politicus comme il y en a de plus en plus en Belgique ? Quelque part oui. Charles de Broqueville est né dans une modeste maison sise dans l’enceinte de l’abbaye de Postel à la place de l’actuel « Kontact centrum ». Cette maison était occupée par Stanislas et Marie-Claire de Briey qui attendaient la fin de la construction du château de Postel. Cette dernière demeure a été construite à partir d’éléments épars d’une ancienne auberge servant de relais pour les diligences. Tant que le nouveau château n’était pas habitable, Stanislas vivait dans le village de Postel situé à l’intérieur de l’enceinte de l’abbaye. L’abbaye de Postel avait été rendue aux Norbertins par la volonté de sa mère, Elisabeth de Robiano qui, en son temps, avait acquis l’abbaye et 4.000 ha aux alentours à travers une opération financière très bien expliquée, dans le livre de Soeur Lutgardis Pirson (1) (suite…)
par Géry de Broqueville | Juil 5, 2008 | Charles de Broqueville

Les princes Xavier et Sixte de Bourbon Parme avec le général Lyautey.
En 1917, la possibilité d’exploiter les chances d’une paix de conciliation qu’offraient les velléités manifestées secrètement par le nouvel empereur d’Autriche et par certains éléments allemands, poussa le Comte de Broqueville à céder le portefeuille de la guerre à un général et à prendre lui-même la responsabilité des Affaires étrangères délaissées par le Baron Beyens. Les négociations menées par le Prince Sixte de Bourbon (sous-officier dans l’armée belge avec son frère le Prince Xavier de Bourbon, à droite sur la photo) échouèrent par suite de l’hostilité de l’Italie et du peu de compréhension de M. Ribot, Premier ministre français.
Le Comte de Broqueville, qui redoutait pour l’avenir, une désarticulation de l’Europe, avait été mis au courant de ces démarches et aussi de celles entreprises par le baron von der Lancken à Bruxelles par l’intermédiaire des barons Coppée et de la comtesse de Mérode qui avait touché Aristide Briand (voir les pourparlers de von der Lancken. Mais il se trouva en dissentiment avec ses collègues quand ceux-ci eurent connaissance de ces derniers faits. Lié par le secret, le premier ministre ne pouvait dévoiler les conversations en cours entre l’empereur d’Autriche et le président de la République M. Poincaré, par l’intermédiaire du Prince Sixte de Bourbon qui éclairaient d’un jour nouveau la tentative de von der Lancken. D’autres tentatives de conciliation comme celle du pape Benoît XV eurent lieu sans plus de succès.
Ministre de la Reconstitution
Il dut abandonner le portefeuille des affaires étrangères au début de l’année 1918. Il devient alors ministre de la reconstitution.
Pour aller jusqu’au bout du problème sur la question de la reconstitution, car il s’agit bien de ce mot et non pas de reconstruction comme on le voit un peu partout, il a été constitué le 22 décembre 1917 lors d’un conseil de ministres. Broqueville avait suggéré au Roi la création d’un nouveau ministère qui allait cordonner les activités des comités de guerre, eux-même regroupés autrement. Durant toute la guerre Broqueville et le Roi ont créé des comités de guerre comme le conseil suprême des forces armées, le conseil de la guerre, etc.Il pensait donner ce ministère à Paul Hymans pour se débarrasser de lui car il ne le voulait pas aux Affaires étrangères, ce que l’intéressé voulait ardemment. Ce dernier a tout fait pour l’obtenir le 22 décembre et Broqueville a du se contenter de rester Président du conseil. Il avait alors le choix d’être sans portefeuille ou avec… et c’est celui de la Reconstitution nationale qui pris pour faire autre chose que de cordonner une équipe !
Et mine de rien organisé la Reconstitution était un ministère qui le piégeait puisqu’il allait de nouveau être en butte aux conceptions personnelles du Roi comme commandant en chef de l’armée. Et ce fut le fameux faux pas et la chute ! (Haag 636)
par Géry de Broqueville | Juil 2, 2008 | Charles de Broqueville
A la fin d’octobre 1917, les usines belges de munitions installées en Angleterre fabriquaient leur millionième obus. Cela donna lieu à un échange de télégrammes très cordiaux entre Winston Churchill et Charles de Broqueville. Le message du Premier ministre belge se terminait par cette déclaration : « Notre ferme détermination est de combattre sur tous les champs de bataille jusqu’au jour où la paix sera obtenue par la victoire… ». C’était la réponse belge au discours de von Kuhlmann qui offrait à la Belgique une paix séparée. Rien n’était changé dans la politique belge qui restait fidèle aux alliés.
Déjà, au début de août 1917 en réponse à une nouvelle tentative de conciliation faite par le Saint-Père près de tous les belligérants , le roi Albert, dans une lettre autographe envoyé à Benoît XV évoquait la réponse qu’il avait adressée un an auparavant au président Wilson. Le Souverain disait : « La Belgique lutte pour son indépendance politique et économique et militaire sans conditions et restrictions. Elle exige des réparations pour le dommage subi et des garanties contre le renouvellement de l’agression de 1914. »
Géry de Broqueville.
par Géry de Broqueville | Juin 30, 2008 | Guerre 14-18

Le gouvernement belge à Sainte-Adresse en 1918
Jules Renkin, ministre d’Etat, est celui qui a le mieux défini la raison d’être du gouvernement belge au Havre, dans un article du Times de 1920 : « Le devoir primordial était de maintenir la souveraineté belge et ses organes légaux, de faire que la Belgique envahie conserve un gouvernement légitime, capable de représenter devant le monde les intérêts généraux du pays et de veiller à leur défense…« .
Le gouvernement belge, à son arrivée au Havre, était composé de 10 membres. Il comprenait le Président du conseil et ministre de la Guerre, M. de Broqueville ; ministre de la Justice : M. Carton de Wiart ; ministre des Affaires étrangères : J. Davignon ; ministre de l’Intérieur : P. Berryer, ministre des Sciences et des arts : P. Poullet ; ministre des Finances : A. van de Vivère, ministre des Travaux publics et de l’Agriculture : G. Helleputte ; ministre du Commerce et du Travail : A. Hubert ; ministre des Chemins de fer, de la Marine, des Postes et Télégraphe : P. Segers ; ministre des Colonies : Jules Renkin. En 1916, à la demande du roi, M. de Broqueville fit rentrer de façon effective trois membres de l’opposition, MM. Paul Hymans, Goblet d’Alveilla et Vandervelde que le roi avait nommé, le 4 août 1914 comme ministres d’Etat.
L’idée était de montrer aux Belges à quel point la Belgique se devait d’être unie. Cela dégagea quelques discussions au sein du gouvernement de 10 membres, mais M. de Broqueville précisa tout de même que « le gouvernement tel qu’il se complète, est appelé à disparaître dès que les mesures de guerre et les clauses de paix auront été ratifiées par le parlement. » M. de Broqueville rendait compte au roi dans son rapport que le programme gouvernemental restait inchangé. « Il se synthétise entre ces deux pensées, les seules qui soient aujourd’hui dignes d’absorber intégralement un gouvernement de patriotes : pourvoir toutes les nécessités qui découlent de l’état de guerre et mener la Belgique dans les conditions les meilleures à la paix la plus favorable. ». « Quand sonnera l’heure certaine de la victoire finale, la nation répondant à l’appel de Votre Majesté se retrouvera maîtresse de régler ses destinées conformément à la voix de sa conscience. »
Le 18 janvier 1916, M. Davignon, ministre des Affaires étrangères, malade depuis de longs mois, donnait sa démission et le Baron Beyens, ancien ministre du roi à Berlin pris sa place après que le roi eut nommé M. Davignon ministre d’Etat pour lui permettre de siéger encore au gouvernement. Ce dernier mourut à Nice le 16 mai suivant.
Le 14 février 1916, les ministres de France, de Grande-Bretagne et de Russie, accompagnés des représentants de l’Italie et du Japon, sont venus à Sainte-Adresse pour déclarer officiellement au gouvernement belge que, le moment venu, il serait appelé à participer aux négociations de paix et que les puissances alliées ne mettaient pas fin aux hostilités sans que la Belgique soit rétablie dans son indépendance politique et économique, et largement indemnisé des dommages qu’elle a subis. Le baron Beyens a répondu ainsi : « Nous sommes tous résolus à lutter énergiquement jusqu’au triomphe du droit pour lequel nous nous sommes sacrifiés sans hésitation… » Cette déclaration de Sainte-Adresse mettait fin à la tutelle sous laquelle se trouvait la Belgique depuis 1830. C’était donc un événement d’une très grande importance. Le sacrifice et le canon, la vaillance et l’héroïsme lui donnaient enfin le rang auquel elle avait droit, celui d’une nation libre et indépendante.
Dans un remarquable rapport au roi, M. de Broqueville dit ceci : « …La guerre sera poursuivie sans qu’il puisse être question d’une entente séparée avec l’Allemagne. Le gouvernement s’efforcera de restaurer la Belgique et sa colonie dans la pleine indépendance politique, économique et financière. Il ne négligera rien de ce qui, par le statut international, peut assurer au pays dans l’avenir la plénitude de ses droits souverains… »
Deux ministres d’Etat moururent à Sainte-Adresse et n’ont pu ainsi revoir la patrie : en septembre 1915, M. Huysmans, député de Bruxelles et le 29 juin 1917, M. Schollaert, député de Louvain, membre du parti catholique et prédécesseur de Charles de Broqueville.
Des missions diplomatiques
Le gouvernement de Sainte-Adresse envoya beaucoup de missions diplomatiques à l’étranger comme au Brésil, en Argentine, en Espagne, en Suisse, en Italie et en Hollande. M. Carton de Wiart, ministre de la justice partit en Suisse pour régler le grave problème de l’internement des officiers et soldats belges libérés de captivité. En septembre 1917, une mission belge rentra des États-Unis. Elle fit près de 18.000 Km pour sensibiliser les Américains à la juste cause de la Belgique. Deux parlementaires originaires de Flandre sont partis au Transvaal pour donner une suite de conférences aux Boers qui étaient en train de se révolter, pensant que les Pays-Bas étaient menacés dans leur indépendance. M. Emile Vandervelde partit pendant 4 mois en Russie juste après le début de la révolution pour « saluer la Révolution », mais il était du même avis que le gouvernement belge a qui il avait déclaré que sa présence en Russie pouvait avoir une influence favorable au maintien de l’entente entre la Russie révolutionnaire et les alliés. M. de Broqueville n’avait-il pas dit à Ostende dès octobre 1914 : « Pour moi, le point noir, c’est la Russie ». Après avoir accompli son voyage par les états scandinaves, il arriva à Petrograd en compagnie de Trotsky, quasiment en même temps que Lénine qui avait dû traverser l’Allemagne. M. Emile Vandervelde retrouvait en Russie Albert Thomas et Henderson envoyés aussi pour « galvaniser » les Russes. Ils eurent tous de longues conversations avec Kérensky et son gouvernement tandis que Lénine et ses partisans couvraient d’injures les « missionnaires » alliés qui échouèrent dans leur mission !
Un soutien des populations restées au pays
Le gouvernement a accueilli beaucoup de délégués représentant les belges restés en Belgique occupée pour essayer de remonter le moral des Belges mais aussi à veiller à ce que la population soit ravitaillée, ce que l’occupant allemand n’avait pas prévu de réaliser. Ainsi beaucoup de personnalités belges se sont rendues à Sainte-Adresse.
Nulle convention issue des congrès internationaux d’avant-guerre n’avait prévu qu’un pays pourraient rester souverain et indépendant alors que la majeure partie de son territoire se trouvaient aux mains d’un ennemi. Le gouvernement belge ne pouvaient abandonner sans direction les populations restées en pays occupés, leurs intérêts et leur vie même étaient en jeu. L’on vit cette chose curieuse : le gouvernement belge réussissait à gouverner officieusement le pays en donnant, à maintes reprises, des directives et des conseils aux hautes personnalités restées en Belgique, et qui, dans une collaboration forcée avec les autorités allemandes d’occupation s’efforçaient de suppléer les administrations gouvernementales. Le salut de la Belgique dépendait de la sauvegarde de la population des territoires envahis.
Durant la guerre, certaines de ces personnalités reçurent la permission des autorités allemandes de se rendre au Havre, soit par la Hollande, soit par la Suisse pour régler des questions d’ordre public. Ainsi en septembre 1914, le Cardinal Mercier était parti à Rome pour élire le pape Benoît XV. A son retour, le cardinal s’arrêta au Havre, refusant de rentrer par l’Allemagne. M. Francqui, directeur de la Société générale de Belgique put se rendre à Londres pour rencontrer M. Hoover (futur président des Etats-Unis) et préparer avec lui la lutte contre la faim et la disette. Chaque fois que cela a été nécessaire, M. Franqui passait par le Havre avec un passeport allemand. Il n’était pas le seul. A Sainte-Adresse, l’on a vu MM. Hankar, directeur général de la Caisse d’épargne ; Maurice Despret, président de la Banque de Bruxelles ; Camille Huysmans, Paul Pastur, député ; Emmanuel Janssens, vice-président du Comité national de ravitaillement. L’on vit aussi apparaître en « mission » les grands capitaines d’industrie comme MM. Paul van Haegaerden, Ernest Solvay, Digneffe, ; des conseillers provinciaux comme MM. Heugen et Jottrand ; des banquiers comme le baron Lambert ou le baron Goffinet…
Lorsque l’œuvre de ravitaillement commença à fonctionner, le gouvernement du Grand-duché de Luxembourg pria le baron Evence Coppée d’intervenir auprès du gouvernement belge pour demander que la population luxembourgeoise soit également ravitaillée par la même organisation belge, qui secourait déjà le nord de la France.
Le Baron Coppée, en accord avec le ministre d’Espagne et des Pays-Bas, se rendit au Havre et à Saint-Pierrebroucq. Le gouvernement se montra aussitôt favorable à la demande luxembourgeoise et M. de Broqueville essaya à Londres d’obtenir l’accord de l’Angleterre. Malheureusement, les efforts du premier ministre ne purent aboutir. Le gouvernement anglais se montra formellement opposé à l’extension du ravitaillement aux populations civiles du Luxembourg. « C’est à l’envahisseur, disait-on à Londres, qu’il appartient de nourrir les pays envahis. »
Une des personnalités que l’on vit venir le plus souvent à Sainte-Adresse était Michel Levie, ancien ministre des Finances. Il était le représentant du gouvernement belge en pays occupé. Les barons Coppée sont aussi venus fréquemment examiner la question du travail dans les mines. Les conférences eurent lieu à Saint-Pierrebroucq et au Havre. M. de Broqueville et les ministres ensuite reconnurent qu’il était préférable de continuer à exploiter les mines en territoires occupés plutôt que de s’obstiner dans une carence sans utilité pour l’intérêt national. L’on évita ainsi d’éviter d’augmenter le nombre de chômeurs déjà en charge des comités de secours belges. De même le charbon était indispensable à la population belge, charbon que les Allemands dédaignaient puisque leurs charbonnages étaient proches de la frontière. Ces dispositions prises permirent d’éviter à la Belgique d’inutiles privations et apportèrent une grande amélioration à sa situation économique et morale. Le baron Coppée devra d’ailleurs subir un procès dont il sortira acquitté, accusé d’avoir servi ses intérêts et ceux des Allemands dans cette affaire de mines, ces dernières fonctionnèrent au ralenti puisqu’en 1913, la Belgique produisait 22 millions de tonnes et en 1918, elle n’en produisait plus que 13 millions. Nous verrons cela dans un autre chapitre.
Géry de Broqueville
par Géry de Broqueville | Juin 30, 2008 | Guerre 14-18

Timbres belges avec cachets français de sainte-Adresse sur une carte postale de l’armée.
Sainte-Adresse est une ville balnéaire située tout à coté de la ville du Havre.Dès le début de la guerre, en 1914, elle est devenue la capitale administrative de la Belgique et le siège du gouvernement belge.
A l’aube du 14 octobre 1914, l’arrivée des paquebots en provenance de la base arrière d’Ostende amenèrent les ministres et leur suite. L’hostellerie du Nice-Havernais devint le siège de nombreux ministères. La villa Hollandaise est aux Affaires étrangères. Les services du ministère de la Guerre sont à la villa Louis XVI. Les ministères voisinent avec les légations et les services les plus divers. Il y en a aussi au Havre même. La censure se trouve à l’hôtel de ville. La villa Roxane a été réservée à M. de Broqueville, une autre villa, La Roseraie, devait devenir la résidence royale, seulement, le roi ne vint jamais au Havre. Il ne voulu jamais quitter sa villa de La Panne, l’une des dernières villes de son royaume et la reine refusa de le quitter voulant partager les affres de la guerre avec son époux. La maison du roi fut représentée par le général Jungbluth, ancien précepteur du roi. il s’installa à la villa Maritime dès le 15 octobre. le général Comte de Grunne pris aussitôt le commandement du Havre. Il était un soldat énergique, fin diplomate et administrateur éprouvé.
Le 16 octobre, le conseil municipal lança un vibrant hommage comme accueil au gouvernement belge sur son territoire et le lendemain, les ministres belges recevaient une première visite officielle d’une délégation du conseil municipale de Paris et du Conseil général de la Seine. En leur honneur, le gouvernement belge organisera une « réception » à l‘hostellerie du Nice-Havernais. La villa Louis XVI avait accueilli les services du ministère de la Guerre qui, chaque matin, montait les couleurs dans la cour se trouvant devant l’entrée du ministère. Mais le véritable Q.G. du ministre, M. de Broqueville était d’abord Dunkerque, puis Saint-Pierrebroucq chez le baron Cochin et ensuite Steenebourg.
Le Palais des Régates était affecté au logement des légations. La cuisine y sera excellente. Mais il y avait deux tables distinctes : celles des pays alliés et celle des pays neutre. L’on verra des changements de couverts. Ainsi lorsque la Roumanie se rangea du coté des alliés, le couvert rejoint triomphalement la table des alliés et quand la Bulgarie rejoint le camp des Allemands, son couvert a été discrètement retiré. Dans le vaste immeuble du Nice-Havrais, le ministère des Colonies siège dans un magasin de literies. Le ministère de la Justice manquait de place dans ses locaux et l’on vit une salle de bain transformée en bureau ministériel.
M. de Broqueville, chef du gouvernement, vint très souvent à Sainte-Adresse, mais il fit rarement de longs séjours (1). Il y arriva le 3 novembre 1914, venant directement de Dunkerque en auto pour y présider le premier Conseil des ministres. Le soir même, il assista à la cérémonie du drapeau. Une foule nombreuse de réfugiés s’y précipita pour voir « le magnifique organisateur de la résistance ». Au Conseil des ministres, M. de Broqueville donna lecture d’un rapport sur les évènements qui s’étaient déroulés dans les journées qui suivirent l’embarquement d’Ostende et rendit compte de la conférence interalliée qui venait d’avoir lieu à Dunkerque, le 1er novembre. le conseil ratifia toutes les mesures prises tant à Nieuport, qu’à Furnes, à Dunkerque et à Calais. Puis les ministres envisagèrent un plan de travail qui donna la priorité au sort des réfugiés. C’est pendant ce premier séjour que le ministre de la Guerre eut une longue conférence avec le directeur du Creusot et le commandant Blaise et de son cabinet militaire ainsi que du commandant Laurens, chef de la mission militaire française près de l’armée belge. Avant de quitter le Havre. Charles de Broqueville reçut officiellement l’amiral Charlier, gouverneur de la place, M. Hennion représentant le gouvernement français, les ministres plénipotentiaires d’Angleterre, de Russie et quelques autres notabilités. Le 6 novembre, il repartait déjà par la route, jusque Dunkerque.
Pendant quatre années, les ministères sont restés à Sainte-Adresse. mais les ministères ne resteront pas isolé dans ce « havre de paix » puisque des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants vont travailler durant toutes ces années pour soutenir l’effort des troupes au front. Au plus fort de leur activité, en 1917, 14.000 soldats belges, 4.000 femmes et enfants de soldats y travailleront pour le salut commun. La Seine inférieur comportera 37.000 réfugiés belges dont 22.000 pour le seul arrondissement du Havre. Et donc il y avait beaucoup de travail comme on l’a déjà vu dans les pages qui précèdent pour ce qui est de l’approvisionnement en munitions dans la base de guerre du Havre ou celle de Calais-Gravelines. Bien souvent la quiétude de Sainte-Adresse sera troublée par le canon ou l’explosion de mines au large du Havre pour lutter contre l’arrivée de sous-marin ennemi. Le 30 octobre, les ministres sont à peine installés, que le base militaire du Havre annonce que les batterie de La Hève vont faire des tirs de guerre à toute puissance. Les lourds obus sont ainsi passés presque quotidiennement au-dessus de l’hostellerie des ministères.
Pendant ces quatre années, certains ministres vont « s’ennuyer » au point de faire valoir tel préséance sur un autre ministre alors que la tâche est immense au dehors. Il est vrai que la situation du gouvernement était étrange. Alors que l’immense effort demandé aux belges sur place était tout orienté vers le ravitaillement des troupes, certains ministres avaient le sentiment de perdre leur temps. L’inactivité de certains ministères contrastaient en tout cas avec la sur-activité de celui du ministère de la guerre. De plus le chef de gouvernement était comme on l’a vu très souvent absent. En tout cas la majorité du travail des ministères présents à Sainte-Adresse était orienté vers les réfugiés et l’appel aux Belges valides pour qu’ils s’engagent comme volontaire pour la durée de la guerre.
Le bureau de poste belge

Dès son arrivée le gouvernement belge avait fait aménager un bureau postal dans les dépendances du palais des Régates et vendaient des timbres belges portant la surcharge « Havre-spécial ». Ce bureau fonctionna pendant près d’un an, puis l’on ouvrit un bureau uniquement belge, Place Frédéric-Sauvage, à Sainte-Adresse dans le bâtiment des ministères belges. Le nouveau cachet d’oblitération porte « Sainte-Adresse. Poste belge – belgische post » Les timbres de 1 à 25 centimes représentent l’effigie du roi et ceux de 35, 40 et 50 centimes représentent des monuments détruits par les Allemands, les Halles d’Ypres, la collégiale de Dinant et les Halles de Louvain. Les timbres de 1, 2, 5 et 10 francs représentent l’affranchissement de l’Escaut, la reprise du Congo et la remise du drapeau par le roi sur le perron de l’hôtel de ville de Furnes.
Composition du Gouvernement belge
Une séance du Conseil des ministres à l’hostellerie de Sainte-Adresse (19 septembre 1916)
Assis autour de la table : MM. van de Vyvère, Comte de Broqueville, Jules Renkin, Emile Vandervelde, Poullet, Berryer, Franz Schollaert, Baron Beyens, Carton de Wiart, Cooreman. Debout au second plan de gauche à droite : MM. G. Helleputte, A. Hubert, Goblet d’Alveilla, Paul Segers et Paul Hymans.
Bien que certains ministres se sentaient sous-occupés, le gouvernement belge avait une véritable mission qu’il a accompli : l’organisation de la Belgique exilée et l’approvisionnement de la Belgique occupée, la réorganisation de l’armée et le développement d’une industrie de guerre.
Géry de Broqueville
(1) voir un autre article : la vie quotidienne à sainte-Adresse.