Puisque nous n’avons pas d’enregistrement d’époque, nous avons parfois du mal à imaginer comment parlaient nos ancêtres de 1671. Dans une reconnaissance de dette pour Guillaume du Bouzet datée de 1671 (1), nous avons un texte complet et parfaitement lisible. J’avais déjà signalé cela pour un autre texte du notaire Ponsin qui, généralement, écrit avec une écriture désinvolte qui rend la lecture parfois très difficile et certainement impossible pour certains mots. Chose rare chez les notaires monfortois d’écrire, que dis-je, de calligraphier leurs textes au point l’on se demande comment les clients acceptaient ces pattes de mouches alors qu’eux-même avait été à l’école puisque signant le contrat, la reconnaissance de dettes, etc.
Pour rappel, Monfort possède depuis au moins le XVe siècle une école qui donne un grand nombre d’habitants lettrés en comparaison d’autre bastides qui n’en possèdent pas.
Comme il est trop rare de voir le notaire Ponsin écrire si bien, voici le texte facilement déchiffré dont on trouvera le texte en pdf ci-dessous : « Et tout incontinant constitue en personne Dominique Sinaze sargeur habitant dudit Monfort lequel de son bon gré a confessé devoir et être tenu de payer à noble Guillaume du Bouzet de Bives présent et acceptant savoir deux sacs blé froment mesure de Saint-Clar qu’a reçu ci-devant lui est coutant lesquels deux sacs blé ledit Sinaze a promis pays audit sieur du Bouzet ou à son certain mandement au jour des fêtes de Notre-Dame d’Août prochain tenant comme ce voudra au plus haut prix dans ledit Saint-Clar entre ci et le dernier charge de mai ou le premier juin de l’an prochain tenant ce que a promis faire à l’obligation de tout échange des biens présents et avenir celui soumis aux rigueurs de la justice et ainsi l’a promis et juré présent le sieur Soliraine et Poumès soussigné avec le sieur du Bouzet non ledit Sinaze pour ne savoir et moi«
Bien sûr, l’on comprend le texte mais qu’est-ce qu’il est alambiqué ! Il présage certainement des textes des notaires actuels, c’est clair. Mais comme l’on a que peu de texte de la vie courante, l’on pourrait se demander comment les personnes parlaient entre-elles ? Était-ce des phrases aussi compliquées qui étaient utilisées pour expliquer quelque chose de simple ? Cela reste un grand mystère pour moi.
Il est évident que les mesures de Saint-Clar ne nous sont pas connues non plus. Les protagonistes de l’affaire s’entendent bien sur le poids et la valeur de deux sacs de blé froment, or ici l’on est à Monfort. Cette dernière a aussi un type de mesures que l’on appelle « mesures de Monfort ». Malgré les 15 km qui séparent les deux bastides, on aurait des unités de mesures différentes ?
Mais si ce texte si bien écrit a été choisi c’est parce que le nom de noble Guillaume du Bouzet, seigneur de Bivès, n’est pas inconnu de ma famille. En effet, ce dernier a épousé Marie Broqueville d’Empiroy (1653-1726) fille de Jean (+ 1662) et de Marguerite Dulaur (après 1667). Guillaume est le fils d’Octavien du Bouzet de Bivès et de Philiberte de Castelbajac.
Géry de Broqueville
(1) Archives départementales du Gers, Auch, coté 3E8865 (folio 259). (Pdf : 15252)
Note : Suite à la publication de cet article, Simone Gallenne m’a envoyé cette petite note en guise de réponse à ma question de savoir si les mesures de Monfort étaient différentes de celles de Saint-Clar.Voici sa réponse : « Oui, toutes les communes avaient leurs propres mesures de contenance et de longueur parfois avec une assez grande différence entre elles ce qui causaient pas mal de difficultés pour commercer. A Monfort les mesures utilisées devaient même obligatoirement avoir le sceau de la ville pour être acceptées. En France, c’est le 8 aout 1790 que l’assemblée nationale a voté la création du système métrique des poids et mesures (pour une fois quelque chose de positif dans la révolution…) afin d’unifier tous les systèmes de mesures, il sera applicable en 1795 et d’ailleurs utilisé dans beaucoup de pays européens. » Merci, Simone pour ces précisions.