Comme quoi, je fais bien de reprendre systématiquement tous les actes des notaires. Cela paraît fastidieux mais combien enrichissant. Dans un acte relativement anodin intitulé « Acte de réquisition pour Jean Broqueville fils d’Antoine bourgeois » du notaire Labaule (1) du 30 novembre 1639, j’ai trouvé des informations fort importantes.
A la fin de cet acte, les témoins sont cités : Jean Broqueville fils de Pierre et Joseph fils de Jean. Le troisième Broqueville signataire est le requérant : Jean fils d’Antoine. Bien sûr dans le texte le notaire ne différencie pas les branches. Or les trois branches sont représentées.Tout d’abord, le requérant est Jean Broqueville d’Endardé (vers 1587- avant 1664) marié le 9 juillet 1620, à Françoise de Saint-Arroman née vers 1600. Jean est fils d’Antoine (+ après 1648) et de Jacquette de Mallac, fille de Jean-Jacques, sieur de Sarracave et de Marie de Faudoas.
Le deuxième signataire est Jean Broqueville d’Empiroy fils de Pierre. La signature nous indique que c’est Jean (+ avant 1670) qui a épousé, à Marsac le 19 septembre 1648, Marguerite Dulaur (+ avant 1667). Jean est fils de Pierre (+ avant 30 avril 1634) et de Marie Busquet (après 1650). Cette affirmation élimine une fois de plus (2) la génération de trop, celle de Jehan marié à une autre Marie de Busquet..
Le troisième signataire est Joseph (+ vers 1650) marié à Seguine Lauzéro.. Ici nous avons affaire à la branche bourgeoise. Nous avons déjà d’autres signatures de ce Joseph. Il est fils de Jean (+ avant 1618) et de Péronne Treilhe.
Nous voyons ensuite que le requérant, Jean fils d’Antoine a sept enfants. Dans l’acte en question il y a une forme de règlement de compte entre Jacques Libéros (+ 20/12/1658) fils d’Antoine, beau-fils. Ce dernier a épousé, le 13 avril 1637, Gracie Broqueville (vers 1610-1690). Ce couple aura 6 enfants.
L’acte fait référence aux 900 livres que Jean Broqueville s’est engagé à payer audit Libéros dans son pacte de mariage qui ne semble pas daté. Visiblement, il ne l’a toujours pas fait et Jacques Libéros qui lui-même a beaucoup d’enfants réclame son du. Il semblerait que Jean Broqueville n’arrive pas à payer la dot de sa fille. L’acte va se terminer en défaveur de Jacques Libéros qui refusera de le signer.
Jean requiert la présence de deux personnes supplémentaires qui sont David Lafitte et Vital Dupuy comme parents et amis commun (aux deux parties). Vital Dupuy a épousé Jeanne-Marguerite Broqueville d’Empiroy, nièce du requérant, née vers 1614 et décédée à l’âge de 60 ans environ, le 15 janvier 1674. Son acte de mariage existe aussi et nous montre qu’elle est mariée le 8 janvier 1629 à Vital Dupuy bourgeois de Tournecoupe (4). Dans le présent acte, on y voit d’ailleurs le couple dont Jeanne est fille de Pierre d’Empiroy cousin germain du requérant. or le seul cousin germain de Jean d’Endardé prénommé Pierre est bien le fils de Jean et de Marguerite Dulaur. Cet acte ne nous parle pas de l’épouse de Pierre. Et voici donc une descendance pour ce Pierre Broqueville dont la généalogie habituelle dit qu’il est mort célibataire.
Une nouvelle Broqueville apparaît dans ce texte : Blasiette Broqueville. Mais là l’affaire est un peu plus corsée. Il est dit ceci : « Ledit Broqueville a nommé ledit libéros de qu’il lui fait suspecter attendu le dit Lafitte est marié avec Marie Lauzéro fille de Blasiette Broqueville sa cousine germaine« . Retenons donc que Blasiette est la mère de Marie Lauzéro, d’où le fait que Blasiette soit mariée à un Lauzéro. Blasiette et dite aussi « sa cousine germaine » comme Pierre Broqueville d’Empiroy est « cousin germain » du requérant, on pourrait alors conclure (provisoirement) que Blasiette est la sœur de Pierre puisque il semble qu’il n’y ait que ce rameau qui soit partie prenante dans cet acte (5). Et cette phrase nous amène au fait que David Lafitte est donc aussi parent du requérant par le fait que sa belle-mère Blasiette est cousine germaine de Jean Broqueville d’Endardé. Est-ce à cet endroit que l’on a découvert un siècle plus tard le cousinage lointain évoqué par Marianne d’Entraygue Lauzéro (16 ans) avec Joseph de Broqueville au troisième ou quatrième degré ? (voir texte écrit le 17 octobre 2010, dans ce blog en cliquant ici.)
Un autre élément intéressant est que Gracie est issue du premier mariage de son père avec Jeanne Limoges (3). On y voit que sont grand-père est Jean Limoges. Ce dernier avait déjà donné une somme d’argent dans le pacte de mariage de Gracie avec Jacques Libéros.
Et autant le citer aussi, parmi les témoins, il y a Sansom Carrette qui a épousé Jeanne Limoges. Ils sont les parents de Blasie Carrette qui épousera 13 mai 1652 Jean Broqueville (+ après 1675) de la branche bourgeoise fils de Jehan et de Anne Carrette. Mais là, ce Sansom n’a rien avoir avec l’acte si ce n’est qu’il est témoin présent et signataire.
Et pour glisser une petite cerise sur le gâteau, signalons que le notaire Labaule est prénommé Guillaume. Ce dernier a épousé marguerite Broqueville d’Empiroy (6) fille de Pierre et de Marie Busquet. Et donc Marguerite est la soeur de Jean d’Empiroy qui a épousé Marguerite Dulaur.
Voilà donc un acte qui me paraissait anodin au départ mais qui donne un nombre impressionnant de précisions quant à la branche des Empiroy et du cousinage direct avec les Endardé dont descendent tous les Broqueville actuels. Un acte du 4 janvier 1640 nous montre cette fois Jacques Libéros qui attaque et revendique la possession de la métairie de Bigourdas comme paiement de la dot de Gracie Broqueville d’Empiroy. Cet acte n’ajoute rien en termes de généalogie (7).
Un autre acte, toujours chez le notaire Labaule, daté du 26 juillet 1642, montre que Jacques Libéros a encore une créance de 400 livres qui n’a toujours pas été payée par Jean Broqueville d’Endardé fils d’Antoine et qui est cédée à Pierre de Preissac sieur de Pausens en paiement de ladite somme par Jacques Libéros qui en est débiteur et redevable pour une autre transaction. On verra dans la marge qu’en 1645, Pierre de Preissac va céder à son tour cette créance à noble Claude de Caveler sieur de Fluvac. L’on ne sait si au bout des cessions, Jean Broqueville a fini par payer cette dette (8).
En tout cas on peut voir que Jean fils d’Antoine vivait sur un trop grand pied et qu’il n’arrivait pas à nouer les deux bout puisqu’en terme de dot il n’arrivait pas à payer son gendre. Maintenant, il y a peut-être eu une inimitié entre les deux hommes au point où une « guerre » de tranchée avait lieu. Mais c’est faire peu de cas de l’amour paternel pour sa fille Gracie dont on ne parle en aucun cas dans ces différents textes.
Géry de Broqueville
(1) Coté aux Archives départementale du Gers 3E8832 folio 306. (12837-12840)
(2) voir article du 28 février 2013 en cliquant ici.
(3) De son mariage avec Françoise de Saint-Arroman, il a eu Jean, Pierre, Jeanne et Guillaume. Il manque donc deux enfants.
(4) Tournecoupe est un village situé à 11 km au nord-ouest de Monfort.
(5) En termes de Broqueville qui sont les cousins germains du requérant, il y a les enfants de Jean et de Marguerite Dulaur, il y a aussi les enfants de Jehan (Substitut du procureur du roi) et de Gratienne de Pujos et enfin Dominique fils de Pierre et Marie Busquet. Tous de la branche des Empiroy. Il n’y a pas de Broqueville de la branche bourgeoise. C’est ainsi que je conclu que Blasiette est sœur de Pierre.
(6) On connaît son existence dans un acte de 1642, où l’on voit que Marie Busquet veuve de Pierre Broqueville doit encore 400 livres ainsi que des meubles, robes, linceuls, draps à Guillaume Labaule mari de Marguerite (13475-13480)
(7) Pour information je met le pdf (12846-12849.pdf) et le texte en partie déchiffré en txt (12846-12849.txt) qui montrent la détermination de Jacques Libéros qui montre qu’il va aller en justice pour régler cette affaire. Qui sait, les archives départementales du Gers possèdent encore les actes du procès. Joseph Broqueville file de Jean et Péronne Treilhe, est présent comme témoin de cet acte.
(8) Notaire Labaule coté au ADG : 3E8834 ‘folio 137 vo) (texte en pdf : 12961-12962 ) et texte en partie déchiffré en txt : 12961-12962)
NB : Le texte n’a pas été déchiffré complètement seul les parties concernant les liens de parentés ont retenu toute mon attention. Texte complet en pdf (5,8 Mb) – version en txt cliquez sur la référence, 12837-12840.