Le 2 avril 1654, soit 4 jours avant sa mort, Joseph Broqueville fait un acte de donation (1) d’une maison et d’un jardin se trouvant rue de Sainte-Gemme, d’une autre maison située rue de Marahouat dans l’enclos de la ville de Monfort. En plus il donne la somme de 63 livres à son neveu Jean Broqueville d’Endardé.

La signature du donataire est celle d’un Joseph qui décèdera 4 jours plus tard.

On voit bien à la signature de Joseph Broqueville que ses jours sont comptés. Sa main tremble et n’arrive plus à écrire correctement son nom dans cet acte de donation. Son frère Jean Broqueville, substitut, se porte d’ailleurs garant et montre son accord pour cette donation.

La raison de cette donation est que Jean Broqueville d’Endardé s’est montré attentif et gentil pour son oncle durant toute sa vie. Cette donation est assortie d’une condition d’usufruit pour lui-même tant qu’il est en vie dont il ne profitera pas puisqu’il meurt le 7 avril 1654.

Joseph et Jean, le substitut sont les deux seuls enfants de Jean « Vieux » Broqueville décédé le 1er août 1615 à Monfort et de Marie Carrette décédée après 1610 et issue d’une branche Carrette de Bajonnette. Les deux frères ont eu tous les deux une vie bien remplie. Arrêtons-nous sur celle de Joseph qui a été Bourgeois de Solomiac une partie de sa vie, consul en 1595, jurat en 1599 et 1619, bourgeois de Monfort en 1649.

Une vie bien remplie

Élu premier consul en 1600 avec Bertrand Sestailhes, Jehan Saint-Sauby et Pierre Dufaur. Le 21 mars de cette même année, les brassiers qui travaillaient dans les vignes se mirent en grève. Ils demandaient une augmentation de 5 sols par jour. Après avoir conféré avec ses collègues, Joseph réunit les grévistes et leur accorda « deux sols avec la dépense ou trois sous deux fois potage« . Il défendit aux propriétaires de leur donner davantage, sous peine d’une amande de deux écus sols. Et si les brassiers exigeaient une plus forte somme, il les menaça de trois jours de prison. Le 10 mai de la même année, il passa commande chez un fondeur, d’une cloche pour remplacer les quatre qui avait été détruites par les protestants.

Réélu premier consul en 1606, il prit diverses mesures contre la peste qui désolait la contrée. Dans la nuit du 21 mai 1608, il fut attaqué dans la rue par N. Canteloup et Samson Carette et blessé d’un coup de poignard. Les consuls indignés poursuivirent l’affaire et les meurtriers furent mis aux « carces » de la ville (2). 

En 1616, il reçoit 3000 livres de son frères Jean dans le cadre d’une sentence arbitrale effectuée par Janotet et Jean Broqueville fils de feu Antoine. En effet, en tant que cadet, Joseph n’a reçu aucun héritage de son père. Ce dernier s’est remarié avec Jeanne Laborde et lui a donné le reste de sa fortune. Il devait très probablement régner une mésentente avec la belle-mère puisque celle-ci a déshérité les deux frères : Jean et Joseph au profit de deux de ses neveux Jean et Guillaume Ducasse. (14925-14928) (3)

En décembre 1617, il signe comme témoin dans un acte avec Pierre Broqueville. Dans cet acte il est nommé comme fils de feu Jean. (18266). Il est nommé jurât le 4 janvier 1619 par une délibération des consuls de Monfort (2346-2347) Il est cité dans une délibération des consuls de Monfort du 21 janvier 1619, comme étant Joseph fils de feu Jean, habitant de Monfort. (2354 et 2428). En 1622 et 1623, il est dit dans plusieurs actes qu’il est bourgeois de Monfort. On ne parle pas encore de Solomiac. (21892-21893). C’est un acte du 23 novembre 1624 qui indique que Joseph Broqueville est frère de Jean Broqueville substitut. (19021-19028)

Dans un acte de 1625, il est bourgeois de Monfort (22021). Il est parrain de baptême de Joseph fils d’Andrieu Broqueville et de Jeanne Lacourt, le 1er décembre 1626. Dans un acte du 20 février 1628, où il est débiteur en même temps que Jean fils de feu Antoine, il est dit clairement qu’il est fils de feu Jean et habitant de Solomiac. Sa signature confirme bien le personnage (19282). Dans un acte du 14 août 1629, il est dit clairement qu’il est fils à feu Jean et habitant de Solomiac. Dans cet acte il vend deux maisons situées à Monfort, à Dominique Sentis. Parmi les témoins se trouvent Joseph Broqueville fils de Janotet. (15373-15377)

Dans deux actes du 2 et 7 août 1630, il représente des habitants de Monfort, Saint-Brès, Lauret et Bajonnette contre le sieur de Sainte-Gemme (12320-12323 et 12324-12327). Il achète deux pièces de terres de chacune 20 places environ à Dominique Roux la même année (Ref : 12389-12391) En 1633, c’est la première fois qu’on voit qu’il est habitant de Solomiac et non pas de Monfort (Ref : 12447-12448) Propriétaire terrien possédant plusieurs maisons dans la ville de Monfort, des terres, des jardins, des vignes, des prés, des bois… (1457-1469). Il est présent le 7 octobre 1649 – Gasaille pour Jean Broqueville sieur d’Empiroy. (11364-11365)

Quelques jours avant sa mort Joseph rédige donc cet acte de donation à Jean Broqueville d’Endardé qui lui a rendu beaucoup de service durant sa vie. Le neveu de Joseph est Jean Broqueville (1630-1705) marié  en première noce (1651) à Jaquette de Bousquier (vers 1632-1652) et en seconde noce (1656) à Brigitte de Cotignon (1627-1697).

Voilà comment Les Endardé ont pu recevoir une petite partie de cet héritage alors qu’ils étaient parmi les plus pauvres durant la génération précédente.

Géry de Broqueville


(1) Notaire Mazars, coté 3E8905 aux Archives départementales du Gers à Auch (25035-25038).
(2) Sorte de prisons qui dépend des consuls de Monfort.
(3) Les chiffres entre parenthèses représentent la référence de l’information soit dans des registres de délibération, soit dans des actes de notaires.