Anton Carté est le créateur d’une tapisserie se trouvant dans l’enceinte du Sénat de Belgique (1) représentant l’entrée à Bruxelles le 22 novembre 1918 du roi Albert Ier et de la reine Élisabeth tout deux à cheval accompagné par les troupes française et anglaises pour assoir l’autorité royale. Le Roi s’en allait faire un discours de victoire au Parlement.

L’auteur de cette tapisserie, non seulement s’est immortalisé ainsi que son épouse au balcon en arrière-plan sur la gauche de la tapisserie tout en représentant un personnage, qui comme eux-deux, n’était pas présent ce jour-là, le 22 novembre, à cet endroit-là, à Bruxelles, au Parlement. Cet autre personnage se trouve à l’opposé de la tapisserie, dans un coin reculé, un peu à l’ombre, comme un reclus, Charles de Broqueville.

Charles, l’exclus

Et il est un reclus à ce moment-là. il n’est pas à Bruxelles. Il en est même un exclu de la fête de la libération. Il est exilé, en disgrâce de l’autorité royale triomphante, du roi-chevalier. Charles de Broqueville, le 22 novembre 1918 est dans un lit, souffrant d’une mauvaise grippe, heureusement pas de la grippe espagnoles qui aurait eu sa peau, il est dans un lit de souffrance avec une immense tristesse. Loin de son pays et de son Roi, à Poitiers, chez un de ses amis, Henri de Cressac de Soleuvre, mon arrière-grand-père. Ainsi donc mes deux arrières-grands-pères se connaissaient depuis plus longtemps qu’on ne le pense. Ce qui a valu, une rencontre entre mon grand-père Jacques, qui rendant visite à son père en exil, rencontra sa futur femme, Alix de Cressac en cette fin de guerre, en 1918.

Charles de Broqueville est rentré en Belgique le 30 novembre pour apprendre qu’il a été nommé de « force » par Albert Ier comme ministre de l’Intérieur pour faire passer la pilule amère aux catholiques à propos du suffrage universel. Seul Broqueville était capable de faire passer cette loi concoctée en 1912, mais jamais réalisée à cause de la guerre, et tant revendiquée par les socialistes et les libéraux au nom du leitmotiv passée de bouche à oreille dans les tranchées : « un soldat, un vote » !

Si Broqueville est là, caché, tapi dans l’ombre, c’est probablement à la demande du Roi, alors que toutes les personnes du gouvernement se trouvant au centre de la tapisserie, plastronnant, s’attribuant chacun la victoire pour lui-même, et peut-être le Roi en premier, alors que l’artisan principal de cette victoire qui a travaillé dans l’ombre avec opiniâtreté, était perclus de douleur dans un lit, loin de tous, sauf, peut-être de son Roi. Quand Albert 1er est mort en 1934, Broqueville n’était plus rien. C’est d’ailleurs cette année-là qu’il arrêta sa vie politique, se désengageant petit à petit de tout engagement, pour mourir sous le début de l’occupation allemande, le 5 septembre 1940, à l’insu de tous.

Il faudra, un jour qu’un historien écrive cette histoire d’amour et de haine qui unissait les deux hommes, que tout séparait et unissait en même temps.

D’aucun pourra dire que ce texte est écrit par un arrière-petit-fils admirateur de son aïeul et donc sans grande valeur historique. Certes, c’est vrai. mais ce que je transmet ici, c’est justement le résumé de ce qu’en dise les historiens. Je veux juste comprendre ce qui unissait de manière indéfectible ces deux personnages qui ont fait l’histoire de la Belgique !

Géry de Broqueville

(1) Cet exposition est accessible au public du mardi au vendredi de 14h30 à 16h30 jusqu’au 26 octobre 2019 au Sénat rue de Louvain 7, 1000 Bruxelles. Accessible sauf les jours fériés (19/4, 22/4, 1/5, 30/5, 31/5, 10/6, 19/7, 22/7, 15/8/2019.) Plus d’informations en cliquant ici.