Reconnaissons que le corps de cet article n’est pas représenté à sa juste valeur dans le titre. Nous sommes ici devant une reconnaissance de dette d’un Sabathier envers un Broqueville.
Les deux protagonistes de cette affaire ne sont grands personnages que pour la bastide de Monfort ! Il s’agit, d’une part, de maître Izac Sabathier, substitut du procureur du roi de Monfort et de Jean Broqueville (1630-1705) sieur d’Endardé fils de Jean Ier et de Françoise de Saint-Arroman (1600-1655), d’autre part.
Comme annoncé déjà, cet acte (1) est une reconnaissance de dette de la part de maître Izac Sabathier pour une maison achetée par lui le 18 juin 1662 dont l’acte se trouve chez le notaire Mazars (2). Nous sommes le 29 juillet 1669 et c’est seulement à cette date que Jean Broqueville d’Endardé va recevoir un acompte de la somme de 750 livres.
Dans cette intervalle de 7 ans, Jean Broqueville a porté l’affaire devant la Sénéchaussée d’Armagnac puis devant la cour du parlement de Toulouse. C’est sur requête des amis des deux parties que l’affaire commence à se régler devant le notaire Ponsin tout en renonçant au procès qui probablement aurait fait beaucoup de dégâts au sein des deux familles.
En effet, l’affaire est délicate puisque Izac Sabathier a épousé en 1637, Guillemine Broqueville d’Endardé, la sœur de Jean ! Il est clair qu’en vendant sa maison sept années plus tôt à Izac, jamais il n’allait imaginer que ce dernier n’allait pas lui régler l’achat de cette maison ! Cette affaire aura déjà marqué les esprits au point où ils faut des interventions d’amis pour éviter le pugilat !
Il est possible aussi que ce ne soit pas une question de mauvaise volonté mais probablement d’un manque d’argent comme nous l’avons déjà écrit dans un article précédent.
De la bonne monnaie
Izac Sabathier ne vient pas devant le notaire Ponsin, les mains vides. Il apporte l’équivalent de 150 livres en « bonne monnaye ». Il s’agit d’or et d’argent. « deux pièces de 4 pistoles d’Espagne et et une double pistole d’Espagne; deux pistoles, deux Louis d’or et demi , 17 écus blanc ». Prenons la description des monnaies dans l’ordre de présentation.
Deux pièces de quatre pistoles d’Espagne. La coutume de compter par pistoles s’introduisit chez nous après le mariage de Louis XIV. La dot de la jeune reine, Marie-Thérèse d’Autriche, fille de Philippe IV, roi d’Espagne, avait été payée en pistoles d’or d’Espagne dont la valeur était de dix livres de France. La pièce de 4 pistoles a été fabriquée à Bruxelles, ville des Pays-Bas autrichiens. (Photo ci-dessous)
Pièce de 4 pistoles dont le métal est en laiton recouvert d’or.
La monnaie suivante est pleinement en or et est une double pistole en or qui porte le nom du roi d’Espagne, Philippe V. On sait que l’or provient des colonies espagnoles et probablement de Colombie. Cette pièces de double pistole a été sculptée à Séville aux environs de l’année 1620.
La demi-pistole est une pièce en bronze ne valant probablement pas grand chose, bien qu’elle serve quand même a compléter la somme de 150 livres. Cette pièce provient aussi d’Espagne.
Les deux pièces de Louis d’or, Doivent avoir été produite sous Louis XIV probablement et devrait s’agir de celle-ci qui a été produite en 1650. Le texte ne précise pas quel Louis d’or, il s’agit. Ci-dessous, il s’agit de la pièce de Louis XIV à la mèche longue d’autant qu’elle porte le nom de Louis d’or et demi. Tandis que la pièce de Louis XIV à la mèche courte date de 1651 et est un Louis d’or entier.
Les écus blancs qui sont les plus faciles à découvrir. Sur Wikipéda, nous avons cette description : « À partir de 1580, le Conseil des monnaies décide la frappe d’un écu en argent qui vaut le 1/4 de celui en or, soit 15 sols. Ces frappes durèrent jusque sous le règne de Louis XIV.
Le 23 décembre 1641, à la suite de la création du louis d’or (de fait le demi-louis, valant 100 sols ou 5 livres, et pesant 2 deniers et 15 grains, soit 3,345 g d’or à 22/24 carats), on appela les nouvelles pièces d’argent écu ou louis d’argent ou écu blanc d’une valeur de 60 sols, soit 3 livres tournois.«
Et enfin, les témoins de cette transaction en or et en argent sont noble Samuel de Thomas, sieur d’Argèle, maître Bertrand Lauzéro en la cour du Parlement de Toulouse et François d’Arquier, sieur de Mauléon. Pour ce qui est du premier il est le beau-frère de Bertrand Lauzéro, le second témoin. François de Thomas est frère de François qui a épousé Jeanne Lauzéro. Cette dernière est la fille de Bertrand et de Claire de Ferrat. Bertrand est le petit-fils de Blasie Broqueville d’Empiroy qui avait épousé François Lauzéro.
Un acte complémentaire
Je ne comprends pas pourquoi cet acte-ci fait suite à l’acte précédent car il explique la raison du procès et des tensions entre frères et sœur. En effet, dans le registre, il fait immédiatement suite au précédent. On se trouve donc toujours chez le notaire Ponsin (3) avec la même date.
Grâce à ce texte, nous avons la confirmation que Guillemette ou Guillemine Broqueville, sœur de Jean est bien mariée à Izac Sabathier, qu’il y a un litige à propos de l’héritage de leur père « commun » Jean Ier Broqueville dont on connaît enfin la date de décès qui est celle du 7 octobre 1661. L’on sait aussi que son frère Guillaume est décédé avant 1669.
La maison n’a jamais été payée par Izac Sabathier car sa femme Guillemine Broqueville considérait que la valeur de cette maison aurait du lui être donnée au moment du partage pour équilibrer ce dernier.
Le procureur du roi, M. Palanque ayant confisqué tout l’héritage au début du procès, obligeant chacun à montrer tout ce qu’ils avaient reçu lors de cet héritage, il s’avère que le jugement aurait indiqué que l’on ne peut pas se faire justice, soi-même et que Izac Sabathier doit bien payer la totalité de la maison, la valeur de celle-ci ne pouvant entrer dans la masse totale de l’héritage. Le procès n’aura pas lieu, vu l’accord à l’amiable entre les deux parties. Les témoins de l’acte sont les mêmes que précédemment.
On est bien d’accord, ce texte aurait été écrit avant le précédent qu’ l’on aurait mieux compris les termes de l’accord passé !
Géry de Broqueville
(1) Notaire Ponsin coté 3E8980 aux AD32 (23855-23857).
(2) Bien que nous ayons le registre de 1662 à 1665, cet acte ne s’y trouve pas. Il s’agit donc d’un acte perdu. Nous ne connaîtrons pas la situation de cette maison.
(3) Il s’agit bien du notaire Ponsin avec la même date, la même cote. L’intitulé est juste différent : « Acte de transaction entre lesdits sieurs Sabathier et Broqueville ». Référence personnelle pour la lecture de ce texte : 23857-23860