Tout au long de mes recherches dans les archives municipales et départementales, il est rare de trouver des documents qui donnent le nom de Saint-Clément, à l’église paroissiale de Monfort. Nous n’arrivons pas à trouver le moment où ce nom a été donné à l’église. Ceci dit, nous avons avons trouvé un document daté de 1851 qui détaille très précisément l’évolution de la construction de ce bâtiment.
Ce document est intitulé ainsi : « Note historique sur l’église de Monfort, canton de Mauvezin, Gers et mémoire sur son état actuel et sur ses besoins pour servir de documents à l’appui de la demande de son classement au rang de monuments historiques, rédigé par moi curé déservant dans le mois d’août 1851« . Nous reproduisons, ci-dessous, in extenso ce texte. (suite…)
Agnès de Broqueville (1799-1880) aura écrit au cours de sa vie pas moins de sept testaments, tous en possession du notaire Dufrêche de Monfort (1). Ce sont ces documents qui sont remis au tribunal de Lectoure pour vérification. Le tribunal a levé les scellées apposées sur la porte de la maison d’Agnès. Le greffier a découvert les 6 documents dans les papiers de la succession.
Agnès est la dernière Broqueville de la branche des Endardé présents à Monfort. Elle est la fille de Jean Joseph Bernard (1755-1834) et de Ursule de Lherm de Larcène (1752-1817). Agnès a vu la mort de ses 12 frères et sœurs entre 1807 et 1873. (suite…)
L’histoire familiale m’a fait comprendre que ma famille, au sortie de la révolution française, ne roulait pas sur l’or. La génération suivante peut entrer dans la catégorie de prêteur. C’est peut-être compréhensible à partir du moment où Jean Joseph Bernard de Broqueville (1755-1834) a eu d’une unique épouse, Ursule de Lherm de Larcène (1752-1817), 13 enfants. Nourrir tout ce petit monde ne devait pas être chose évidente durant de telle périodes troubles.
L’un de ces rejetons, mon ancêtre Charles Hubert de Broqueville (1785-1871), ancien lieutenant d’infanterie démissionnaire, qui a migré vers la Belgique, s’en est bigrement bien sorti quand je vois le nombre de fois qu’il prête de l’argent à plus pauvre que lui. Certes, nous sommes en 1863, il lui reste à vivre huit ans. Il est retourné vers sa chère bastide tant le soleil devait lui manquer, lui qui a vécu plusieurs années dans la froidure du pays d’Alost, plus particulièrement au château de Ghyseghem. (suite…)
Comment acheter une maison et devoir payer une rente aux prêtres de sa paroisse, toute sa vie ! C’est ce que nous allons voir dans le texte ci-dessous. Imaginez-vous, au XXIe siècle, acheter votre maison et devoir en plus une somme d’argent à un individu qui n’a rien à voir avec la maison ! C’est l’aventure qui est arrivée au sieur Vital Broqueville, sieur d’Empiroy.
Puisque je lis de manière systématique le notaire Ponsin, j’ai trouvé ce texte chez lui (1). Il s’agit d’un acte d’accord entre maître Gabriel Arquier, prêtre, docteur en théologie, recteur de la ville de Monfort et syndic des pauvres (2) qui a réussit à faire condamner Vital Broqueville devant le tribunal du sénéchal d’Armagnac. Ce dernier est basé à Lectoure.
L’acte en question est le rappel de l’affaire et les modalités de paiement pour Vital Broqueville. Les faits sont ceux-ci tel que décrit dans le texte : « pour raison d’une d’une rente annuelle de 22 sous 6 deniers provenant de la fondation de feu maître Jean Volte prêtre et établi sur une maison de la rue d’En Pardeilhan par feu Pierre Abadie dit Pey, possédé à présent par ledit sieur Broqueville« .
Trente-deux ans !
Ainsi donc, lorsque l’on achète une maison, les servitudes y sont incluses qui est de valoir la somme de 22 sous 6 deniers par an. Si l’on connaît le fractionnement des livres en sols on peut déterminer la date approximative d’achat de cette maison puisque Vital doit payer aussi les arriérés s’élevant à 36 livres.
Ci-dessous, le rapport entre la livre, le sou et le denier sous l’ancien régime. On voit alors que la terre a été achetée, il y a environ… 32 ans.
Vital a 22 ans au moment de cet acte daté du 12 juillet 1673. Or, Vital est né le 27 septembre 1651. Il a donc 22 ans. On sait que Vital a été émancipé très tôt au vu du décès de son père, Jean, en 1662 et de sa mère, Marguerite Dulaur, en 1667. L’acheteur est donc bien son père, celui-ci n’ayant jamais payé cette rente, ni sa mère du reste.
Dans la marge, un revirement
Dans la marge, le recteur Arquier revient sur les arrièrés de 36 livres. Je epnse que des personnes influentes ont du raisonner le recteur Arquier qui annule cette dette quelques semaines plus tard. Vital s’est engagé à payer cette somme, mais il faut reconnaître que pour un jeune homme de 22 ans, il est difficile de découvrir une telle dette que son paternel aurait du payer annuellement. Par contre, il s’engage a payer à la « fête de Notre-Dame d’Août » chaque année la somme de 22 sous 6 deniers.
Ce qui est étonnant, en vieux français, il est écrit le mot « cancellation » pour annulation. Était-ce un emprunt à l’anglais de l’époque, une influence de la ville de Bordeaux, port de mer, longtemps dominée par les rois d’Angleterre ? Ce n’est pas la première fois que je vois ce mot dans les textes. Je n’ai jamais lu le mot « annulation ».
Géry de Broqueville
(1) Notaire Ponsin côte 3E8982 aux Archives départementale à Auch (24057-24060)
Reconnaissons que le corps de cet article n’est pas représenté à sa juste valeur dans le titre. Nous sommes ici devant une reconnaissance de dette d’un Sabathier envers un Broqueville.
Les deux protagonistes de cette affaire ne sont grands personnages que pour la bastide de Monfort ! Il s’agit, d’une part, de maître Izac Sabathier, substitut du procureur du roi de Monfort et de Jean Broqueville (1630-1705) sieur d’Endardé fils de Jean Ier et de Françoise de Saint-Arroman (1600-1655), d’autre part.
Comme annoncé déjà, cet acte (1) est une reconnaissance de dette de la part de maître Izac Sabathier pour une maison achetée par lui le 18 juin 1662 dont l’acte se trouve chez le notaire Mazars (2). Nous sommes le 29 juillet 1669 et c’est seulement à cette date que Jean Broqueville d’Endardé va recevoir un acompte de la somme de 750 livres.
Dans cette intervalle de 7 ans, Jean Broqueville a porté l’affaire devant la Sénéchaussée d’Armagnac puis devant la cour du parlement de Toulouse. C’est sur requête des amis des deux parties que l’affaire commence à se régler devant le notaire Ponsin tout en renonçant au procès qui probablement aurait fait beaucoup de dégâts au sein des deux familles.
En effet, l’affaire est délicate puisque Izac Sabathier a épousé en 1637, Guillemine Broqueville d’Endardé, la sœur de Jean ! Il est clair qu’en vendant sa maison sept années plus tôt à Izac, jamais il n’allait imaginer que ce dernier n’allait pas lui régler l’achat de cette maison ! Cette affaire aura déjà marqué les esprits au point où ils faut des interventions d’amis pour éviter le pugilat !
Il est possible aussi que ce ne soit pas une question de mauvaise volonté mais probablement d’un manque d’argent comme nous l’avons déjà écrit dans un article précédent.
De la bonne monnaie
Izac Sabathier ne vient pas devant le notaire Ponsin, les mains vides. Il apporte l’équivalent de 150 livres en « bonne monnaye ». Il s’agit d’or et d’argent. « deux pièces de 4 pistoles d’Espagne et et une double pistole d’Espagne; deux pistoles, deux Louis d’or et demi , 17 écus blanc ». Prenons la description des monnaies dans l’ordre de présentation.
Deux pièces de quatre pistoles d’Espagne. La coutume de compter par pistoles s’introduisit chez nous après le mariage de Louis XIV. La dot de la jeune reine, Marie-Thérèse d’Autriche, fille de Philippe IV, roi d’Espagne, avait été payée en pistoles d’or d’Espagne dont la valeur était de dix livres de France. La pièce de 4 pistoles a été fabriquée à Bruxelles, ville des Pays-Bas autrichiens. (Photo ci-dessous)
Pièce de 4 pistoles dont le métal est en laiton recouvert d’or.
La monnaie suivante est pleinement en or et est une double pistole en or qui porte le nom du roi d’Espagne, Philippe V. On sait que l’or provient des colonies espagnoles et probablement de Colombie. Cette pièces de double pistole a été sculptée à Séville aux environs de l’année 1620.
Double pistole en or de Philippe V
La demi-pistole est une pièce en bronze ne valant probablement pas grand chose, bien qu’elle serve quand même a compléter la somme de 150 livres. Cette pièce provient aussi d’Espagne.
Pièce de demi-pistole d’Espagne
Les deux pièces de Louis d’or, Doivent avoir été produite sous Louis XIV probablement et devrait s’agir de celle-ci qui a été produite en 1650. Le texte ne précise pas quel Louis d’or, il s’agit. Ci-dessous, il s’agit de la pièce de Louis XIV à la mèche longue d’autant qu’elle porte le nom de Louis d’or et demi. Tandis que la pièce de Louis XIV à la mèche courte date de 1651 et est un Louis d’or entier.
Les écus blancs qui sont les plus faciles à découvrir. Sur Wikipéda, nous avons cette description : « À partir de 1580, le Conseil des monnaies décide la frappe d’un écu en argent qui vaut le 1/4 de celui en or, soit 15 sols. Ces frappes durèrent jusque sous le règne de Louis XIV.
Écu d’argent ou louis d’argent, de Louis XIII le Juste. 1642.
Le 23 décembre 1641, à la suite de la création du louis d’or (de fait le demi-louis, valant 100 sols ou 5 livres, et pesant 2 deniers et 15 grains, soit 3,345 g d’or à 22/24 carats), on appela les nouvelles pièces d’argent écu ou louis d’argent ou écu blanc d’une valeur de 60 sols, soit 3 livres tournois. »
Et enfin, les témoins de cette transaction en or et en argent sont noble Samuel de Thomas, sieur d’Argèle, maître Bertrand Lauzéro en la cour du Parlement de Toulouse et François d’Arquier, sieur de Mauléon. Pour ce qui est du premier il est le beau-frère de Bertrand Lauzéro, le second témoin. François de Thomas est frère de François qui a épousé Jeanne Lauzéro. Cette dernière est la fille de Bertrand et de Claire de Ferrat. Bertrand est le petit-fils de Blasie Broqueville d’Empiroy qui avait épousé François Lauzéro.
Un acte complémentaire
Je ne comprends pas pourquoi cet acte-ci fait suite à l’acte précédent car il explique la raison du procès et des tensions entre frères et sœur. En effet, dans le registre, il fait immédiatement suite au précédent. On se trouve donc toujours chez le notaire Ponsin (3) avec la même date.
Grâce à ce texte, nous avons la confirmation que Guillemette ou Guillemine Broqueville, sœur de Jean est bien mariée à Izac Sabathier, qu’il y a un litige à propos de l’héritage de leur père « commun » Jean Ier Broqueville dont on connaît enfin la date de décès qui est celle du 7 octobre 1661. L’on sait aussi que son frère Guillaume est décédé avant 1669.
La maison n’a jamais été payée par Izac Sabathier car sa femme Guillemine Broqueville considérait que la valeur de cette maison aurait du lui être donnée au moment du partage pour équilibrer ce dernier.
Le procureur du roi, M. Palanque ayant confisqué tout l’héritage au début du procès, obligeant chacun à montrer tout ce qu’ils avaient reçu lors de cet héritage, il s’avère que le jugement aurait indiqué que l’on ne peut pas se faire justice, soi-même et que Izac Sabathier doit bien payer la totalité de la maison, la valeur de celle-ci ne pouvant entrer dans la masse totale de l’héritage. Le procès n’aura pas lieu, vu l’accord à l’amiable entre les deux parties. Les témoins de l’acte sont les mêmes que précédemment.
On est bien d’accord, ce texte aurait été écrit avant le précédent qu’ l’on aurait mieux compris les termes de l’accord passé !
Géry de Broqueville
(1) Notaire Ponsin coté 3E8980 aux AD32 (23855-23857).
(2) Bien que nous ayons le registre de 1662 à 1665, cet acte ne s’y trouve pas. Il s’agit donc d’un acte perdu. Nous ne connaîtrons pas la situation de cette maison.
(3) Il s’agit bien du notaire Ponsin avec la même date, la même cote. L’intitulé est juste différent : « Acte de transaction entre lesdits sieurs Sabathier et Broqueville ». Référence personnelle pour la lecture de ce texte : 23857-23860
Un témoin présent dans un contrat de gasaille est « escolier », ce qui suppose qu’il fait ses études « secondaires » dans le collège de Monfort. Dans la bastide, une rue porte le nom de rue de l’école. On sait par ailleurs que Monfort possédait une école depuis le XVe siècle. Actuellement, il est très difficile de situer le bâtiment.
Le texte ne nous donne aucune autre indication si ce n’est que Jean Bourgade est « escolier ». En tant que lettré il signe comme témoin. Si j’ai découvert ce témoin, c’est juste parce que ce contrat de gasaille se réalise entre Blaise Broqueville bourgeois de Monfort et noble Samuel de Thomas, seigneur du Gerba. (1)
Le système d’enseignement en France au XVIIe siècle
En France, les jeunes enfants reçoivent l’enseignement dans des écoles. On ne connaît pas l’âge où l’on quitte l’école pour aller au collège. Le témoin, même s’il est « escolier », doit certainement plus âgé qu’un enfants. Un notaire ne le ferait pas signr avec un si jeune âge. Jean Bourgade est donc certainement au collège. Un élève du secondaire était « escolier » jusqu’en rhétorique. Après le collège il passe à l’université où il devient étudiant.
Nous savons cela grâce à un article publié dans la base de donnée « Persée » sur Internet qui donne des chiffres parfois fort précis concernant les collèges présents en France. Celui de Monfort n’est pas répertorié ce qui me fait penser qu’à Monfort, il n’y en a pas mais bien une école accueillant les enfants probablement jusqu’à l’âge de 12 ans.
Selon cet article, les collèges qui drainent les Monfortois sont basés à Auch où l’on dénombre en général environ 900 « escoliers » chaque année. Auch ratisse jusqu’à 40 km à la ronde ce qui inclut effectivement Monfort. Il est donc très probable que Jean Bourgade est de passage à Monfort étant basé à Auch pour suivre ses études. Ces collèges étaient en majorité dirigé par les Jésuites accueillant généralement les nobles. A Auch qui est une ville plus rurale, on compte une présence de 10 % de nobles le reste étant des hobereaux.
Dans la première moitié du XVIIe siècle, les familles veulent mettre leurs enfants à l’école pour mieux les armer dans la vie mais aussi pour les pousser à grimper socialement. Les écoles et les collèges croulent sous les demandes au point où certains s’inquiètent que certains métiers indispensables soient en pénurie : « Car la trop grande fréquence des collèges occasionne de quitter le commerce, l’exercice de l’agriculture, et autres arts nécessaires à la vie et société politique pour se précipiter aux escoles, sous l’espérance que chacun a d’accroistre et augmente sa condition, en portant une robbe plus longue que de l’ordinaire. » (2)
L’école étant gratuite, les couches les plus pauvres et laborieuses envoient leurs enfants dans les écoles et les collèges. Les métiers de nos Broqueville semblent devoir être relativiser quand on lit ce texte écrit en 1626 : » Je veux croire, enchaîne l’avis donné à Messieurs de l’Assemblée du Clergé, en 1627, que l’intention de ceux qui nous ont donné ce nombre effréné de collèges était bonne, mais l’expérience nous a fait voir que les effets en sont pernicieux. Premièrement, ils ont fait quantité de lettrés, peu de savants, et puis la facilité a fait que les moindres artisans et les plus pauvres laboureurs ont envoyé leurs enfants à ces écoles où on montre gratuitement, ce qui a tout ruiné : Quiconque a mis le nez dans les livres, dès l’heure s’est rendu incapable de toute vacation. Si, dans un bourg, quelqu’un a appris trois mots de latin, soudain, il ne paye plus la taille; il est procureur, syndic, ou tabellion, ou sergent et par ce moyen ruine ses voisins et chasse ses co-héritiers. » (3)
Un projet qui n’a pas vu le jour évoqué par le cardinal de Perron était de réduire le nombre de collèges à une douzaine pour toute la France. Le Roy lui même voulait limiter le nombre de lettrés tant il y avait pénurie de mains d’œuvre à cause de la présence de milliers d’écoliers incapable de faire autre chose que d’étudier. Au vu de la rareté des écrits et l’absence de bibliothèque dans les collèges ou les universités, il fallait près de 20 ans d’étude pour arriver à avoir un diplôme !
Ainsi, l’on voyait le processus d’enseignement de cette manière : « Dans ces écoles, on enseigneroit seulement à lire et à escrire, chifrer et compter, et en mesme temps on obligeroit ceux qui sont d’une naissance basse et inepte pour les sciences à apprandre des mestiers et on excluroit mesme de l’escriture ceux que la Providence a fait naistre d’une condition à labourer la terre, auxquels il ne faudroit aprendre qu’à lire seulement, à moins qu’on remarquast en eux des semences de lumière et d’ouverture pour les sciences pour lesquelles ils méritassent d’estre exceptez de la loy commune.Les écoliers, reconnus « capables de hautes sciences » par les principaux de ces écoles, pourraient passer des écoles aux collèges et aux universités; mais eux seulement. Ainsi, « on contiendroit dans le commerce et les arts mécaniques ceux qui par leur naissance et par la qualité de leur esprit doivent estre exclus de l’estude des lettres, sans néanmoins éloigner ceux que Dieu favoriseroit »
Quand on parcourt les registres des notaires de Monfort, on se rend compte qu’au XVIIe siècle de plus en plus d’habitants savent signer, ce qui veut dire qu’ils ont été au moins à l’école. Mais l’on voit quand même que parmi certaines familles dont les Broqueville, ceux qui ont une ascension sociale en devenant marchand, bourgeois, notables, substitut, consuls savent effectivement signés alors que ceux qui reste, brassier ou laboureur n’en ont pas la possibilité.
Pour rien au monde, les Broqueville n’auraient accepté la disparition de l’école de Monfort tant cette dernière a été bénéfique pour l’ascension sociale de la famille. Fort heureusement, certaines filles ont eu aussi accès à l’école.
Géry de Broqueville
(1) Notaire Ponsin coté 3E8981 aux AD32 (23980-23981)