Tout au long de mes recherches dans les archives municipales et départementales, il est rare de trouver des documents qui donnent le nom de Saint-Clément, à l’église paroissiale de Monfort. Nous n’arrivons pas à trouver le moment où ce nom a été donné à l’église. Ceci dit, nous avons avons trouvé un document daté de 1851 qui détaille très précisément l’évolution de la construction de ce bâtiment.

Ce document est intitulé ainsi : « Note historique sur l’église de Monfort, canton de Mauvezin, Gers et mémoire sur son état actuel et sur ses besoins pour servir de documents à l’appui de la demande de son classement au rang de monuments historiques, rédigé par moi curé déservant dans le mois d’août 1851« . Nous reproduisons, ci-dessous, in extenso ce texte.

Évolution de l’architecture

Église antérieur au Xe siècle ?

« Tout indiquerait qu’une grande partie de cette église est antérieure au Xe siècle puisque l’on y remarque des traces bien caractérisées de style romano-byzantin primordial qu’on voit dans les églises de ce style qui ont conservé leur caractère primitif. Dans celle-ci qui, plus tard a pris un autre caractère par suite de transformation qu’elle a subi on aperçoit une arcade en plein cintre qui servait à mettre en communication la nef avec l’aile latérale et sous laquelle on bâtit une arcade en ogive pour en former une chapelle aux quatre autres chapelles de l’église primitive, il devait en être nécessairement de même puisqu’elle communique avec la nef par une ouverture en ogive du même style et de la même époque, c’est à dire qu’il devait y avoir des arcades en plein cintre comme à celle-ci qui ont été plus couverte de mortier que la première lorsque les murs ont été enduits.

« On remarquera aussi dans cette partie de l’église primitive trois fenêtre de style romano-byzantin primordial, elles sont petites, étroites et sans ornement, deux d’entre-elles qui étaient correspondantes, c’est à dire en face l’une de l’autre ont été fermée à l’époque sans doute où le sanctuaire actuel fût bâti postérieurement puisque une partie d’une d’elles se trouve dans le contrefort qui correspond de ce coté de l’édifice à l’arc doublant qui forme le sanctuaire et de l’autre coté la fenêtre fermée touche presque à un pareil contrefort de ce dernier coté. On découvre aussi deux autres fenêtres fermées qui étaient tellement étroites qu’elles ressemblaient a de véritables meurtrières. Plus tard même coté on a bâti deux fenêtres en ogive, il existait du coté opposé une des fenêtre primitives.

Il paraît qu’une partie de l’église primitive aurait détruite du coté du couchant puisque l’on y voit encore une colonne bien dessinée du genre de celles qui sont à l’intérieur et quelques empan de nervures dans le même genre de celles qui forment les voutes des chapelles.

La façade

La façade actuelle de l’église et le grand portail auraient été bâtis postérieurement sur la même ligne de cette colonne et de clocher. Le fronton du portail présente quelques particularité : il est supporté deux têtes humaines dont l »une est ceinte d’un diadème et l’autre d’une espèce de voile. L’extrémité du fronton est surmontée d’une tête portant une mitre. Le Tympan rendorme un cul de lampe surmonté d’une couronne. A la base du fronton, il y a des espèces de chapiteaux en partie mutilées, mais encore dessinée pour laisser entrevoir les restes de feuillages fantastiques dont ils était garnis. Une partie latérale entrant dans la chapelle la pus voisine dudit portail a été fermée.

Disposition de l’église dans la ville de Monfort

Le clocher

Le clocher jusqu’à la moitié de son élévation est carré. Ses murs sont d’une épaisseur prodigieuse à chacun des angles du levant et du couchant. On voit à une certaine hauteur des bustes grotesques qui les supportent sur leurs épaules la tête penchée vers la terre et appuyé sur leurs bras à l’intérieur dudit clocher, il y avait autre fois une voûte remarquable par son élévation et par sa construction en pierre taillée et par ses quatre nervures dont il ne reste qu’une partie à chaque angle, parce que une main inintelligente a démoli l’autre partie pour mettre l’horloge au-dessus. Il existe encore dans l’intérieur dudit clocher un plein cintre dans le vide a été rempli en maçonnerie. La lumière y pénètre par une petite fenêtre placée à l’extrémité de la face du levant et une fenêtre au nord aussi fort élevée qu’on peut appeler véritable meurtrière. On monte au sommet de cette tour primitive par un escalier tournant bâti en pierre dans le milieu duquel on trouve même une autre meurtrière. Su cette tour carrée s’élève une autre tour à huit pans et à trois étages. La hauteur totale du clocher tel qu’il est maintenant est de 36,50 mètres. Il est couvert en tuile à canaux. On croit qu’il était autrefois surmonté d’une flèche telle qu’on en voit encore sur les clochers octogonaux bien conservés. Il y avait aussi trois clochetons, il e reste un debout. Il ne reste des deux autres que quelques débris mutilés.

Le portail et les façades latérales

Outre le grand portail, il existe une autre porte latérale appuyée sur le clocher et sous l’angle du levant par laquelle on entre enfin dans l’église en passant par une chapelle. Cette dernière est remarquable par les sculpture qui la décorait autrefois et qui sont aujourd’hui mutilées en grande partie.

Jusqu’ici cette notice ne présente l’église que comme un édifice romano-byzantin primordial. Il faut la considérer maintenant sous un autre point de vue. Elle a gagné au levant ce qu’elle avait perdu au couchant par la démolition qui a été signalée plus haut par le sanctuaire de forme hexagonale qui est d’une époque postérieure et puis les restes de l’église primitive ont aussi, comme le clocher primitif, gagné en élévation par le style romano-byzantin de transition. De là, les ?? doubleaux en ogive et les contreforts pour empêcher la suite des murs sur lesquels ils s’appuient ainsi que les voûtes soit de la nef, soit du sanctuaire, soit enfin des chapelles.

Les fenêtres du nouveau style qui vient d’être signalé tant dans la nef que du sanctuaire ainsi que celles des cloches dans la partie octogonale sont toutes géminées ayant chacune un meneau sur lequel repose dans l’intérieur de l’église des groupes de trèfles ou 4 feuilles bien conservées et très apparentes à l’extérieure de l’édifice. La nef à quatre fenêtres et le sanctuaire six. On en compte 20 aux cloches dont quatre ont été fermée maladroitement dans la partie du couchant. Il y a aussi deux roses assez remarquables. La première surtout par sa forme qui est placée à l’extrémité du chevet et l’autre au milieu de la façade et à quelques mètres au-dessus du grand portail.

L’intérieur

A l’intérieur, l’église possède sept chapelles dont 5 appartenaient aux ailes latérales de l’église primitive et deux qui ont été formée en face l’une de l’autre lorsque le sanctuaire fut bâti postérieurement comme il a été dit plus haut. Toutes ces chapelles sont voûtées. On remarque à la naissance des nervures pour leur servir de support aux unes de têtes humaines grimaçantes aux autres des chiens, des serpents et quelques clés de voûte sont aux armes de France (preuve incontestable de quelque munificence royale. La voûte de la nef est divisée en trois travées par deux arrêtes doubleaux soutenus par quatre colonnes en demi-rond et du sommet desquelles partent les quatre nervures de chaque travée de la voûte. l’arc-doublant qui forme le sanctuaire est moins élevé que les deux autres ; il soutient conjointement avec six colonnettes un demi-rond qui s’élèvent d’un seul jet du pavé jusqu’au comble pour porter les huit nervures qui viennent toutes se grouper autour d’une seule clé.

Restauration gothique ?

Il est bon de rapporter ici l’appréciation et la description de l’église et des cloches telle que l’a faite monseigneur de Lacroix d’Azulette, archevêque d’Auch le 27 novembre 1840 dans le procès verbal de sa première visite de cette église : « L’église de Monfort à l’intérieur se présente sous l’arpente le plus gracieux, voûtes élevées, chapelles de belle dimension, tout en un mot rappelle les belles formes du style gothique naissant. Nous pensons, en effet, que c’est un édifice de l’époque e transition entre celle-ci et le roman qui l’a précédé. Le clocher surtout est remarquable par son élévation, par ses fenêtres en ogive et leurs découpures et par ses huit pans…

Les dimensions de l’église non comprise l’épaisseur des murs, c’est-à-dire sans œuvre sont longueur y compris le sanctuaire 35,20 mètres, largeur de la nef, non comprise les chapelles 12,25 mètres et y compris 22,50 mètres sauf vis-à-vis du clocher qui absorbe la profondeur d’une chapelle et auquel est adossé le baptistère sortant environ 2 mètres dans la nef. L’église possède aussi deux sacristies l’une à droite, l’autre à gauche du sanctuaire et dont l’entrée de chacune est en face des angles de l’autel.

Mémoire sur l’état actuel de la même église et sur ses besoins.

Cette église, au moyen des réparations qui y ont été faites dans les siècles passés et le présent a conservé son caractère d’antiquité et son mérite monumental. On lit sur une colonne à l’intérieur : Réparation faite en l’an 1604″ et puis viennent le nom des quatre consuls de cette année-là. Cette réparation consistait à rebâtir au midi les murs de la nef dans toute sa longueur depuis l’ogive des chapelles jusqu’à la toiture, réparation exécutée probablement suite aux ravages des guerres de religion dont Monfort fût un théâtre quelques années auparavant et dont la preuve est dans les boulets qui ont été trouvé dans l’enceinte de la ville et dans les fossés qui longeaient les 1700 mètres de murailles dont elle était autrefois entourée. On lit aussi à l’intérieur de la façade : « Réparation faite en 1832 » et puis les noms de messieurs le maire, l’adjoint et le curé. Cette réparation consistait à rebâtir la façade depuis la rose placée à son milieu, l’entablement et la corniche qui terminent la façade ainsi que deux contrefort au midi dont l’un fait coin à la dite façade. Les deux contreforts furent bâtis à partir de la toiture des chapelles en 1845. Tous les autres contreforts tant du sanctuaire que de la nef et des chapelles au nombre de 17 ont été restaurés et quelques uns rebâtis en partie avec soin.

Restaurations multiples

Dans cette même année 1845, la toiture des chapelles et des sacristies fût aussi restaurées. Celle du sanctuaire fut restaurée aussi en 1848 et celle de la nef en 1850. Tous ces travaux depuis 1845 ont été faits au moyen de dons particuliers ou avec les revenus de la fabrique. A l’intérieur de l’église, depuis environ 10 ans, bien des travaux ont été effectués, tel que décoration du maître autel, restauration de trois chapelles, bas-relief du sanctuaire, du baptistère, chaire à prêcher neuve, construction de la voûte la nef, acte le tout au moyen de dons particuliers et les petits revenus de la fabrique.

Les besoins actuels de l’église seraient la construction immédiate d’un contre-mur en glacis sur toute la longueur du mur du midi pour protéger son fondement qui a été presque complètement mis à découvert depuis le nivellement de la rue qui lui est adjacente. Ce nivellement devient nécessaire il y a environ 70 ans, époque où fut tracée la route départementale de Fleurance à Mauvezin qui traverse la ville de Monfort en passant devant l’église et la longeant du Nord au levant. Le fondement des deux tiers de la façade fût aussi mis en partie à découvert par suite du tracé de cette route qui a nécessité l’abaissement du terrain pour diminuer la rapidité de la côte qui est à l’entrée de la ville de sorte que dans cette partie de fondement on voit que des moellons qu’il faudrait remplacer pour la consolidation de l’édifice , par des pierres taillées et placées intelligemment avec un ciment bien confectionné.

La nouvelle construction de la façade a besoin aussi d’être recrépie à nouveau, inconvénient qu’elle aura toujours pour avoir été rebâtie avec des moellons, contrairement au style du reste de l’église qui est tout bâti à l’extérieure en pierre taillée du moyen appareil et même en assise quelque fois du petit à certaines distances dans la partie la plus ancienne du monument.

La partie des murs qui touche à grande route du nord au levant aurait besoin aussi d’un contre-mur en glacis aussi mais la dépense de celui-ci serait moindre que celle du premier, parce que le terrain n’a pas été abaissé.

Le clocher aurait besoin de grandes réparations pour être remis dans l’état de sa valeur archéologique primitive. La partie du couchant a surtout souffert des ravages du temps et peut-être aussi de ceux des guerres de religion ont occasionné dans cette ville.

Les colonnettes qui forment les huit pans de ce coté sont en grande partie tombées à l’intérieur des pans. Les pierres en appareil qui les formaient sont tombées en plusieurs part en tambour de sorte que cette partie de l’édifice ne présente plus que des ruines. Les autres pans pourraient être réparés à peu de frais ainsi que les murs depuis le sol jusqu’au sommet. Il faudrait replacé les deux clochetons qui manquent, les deux fenêtres aussi aurait besoin de restauration, celles qui ont été fermées devraient être rouvertes. Une a conservé son meneau avec son trèfle. Tous les autres meneaux ont disparu. A certaines fenêtres, les trèfles à quatre feuilles y sont même suspendus et à d’autres, ils ont entièrement disparu. Chaque fenêtre du clocher à un fronton. Celles de l’église n’en ont pas, elles sont toutes dans un état de conservation satisfaisante, sauf quelques petites dégradations. La toiture du clocher a besoin aussi de restauration.

Un texte inachevé

Il est dommage évidemment de n’avoir pas la fin du texte. Nous ne pouvons donc pas connaître le nom du curé de la paroisse qui a rédigé ce texte. Il est intéressant de noter que dans le texte, l’église primitive remontrait avant le Xe siècle. Or la bastide a été créée en 1275. Il y avait donc un sanctuaire à cet endroit avant la création de la bastide par Géraud V d’Armagnac. Si cette information s’avère exacte, alors l’histoire de Monfort tel que racontée par Jean Morisse (2) n’est peut-être pas tout à fait exacte. L’album ci-dessous montre l’église entre la fin du XIXe et le milieu du XXe siècle avec notre collection de cartes postales.

Géry de Broqueville

  1. Archives municipales de Monfort ref personnelle : 11865
  2. Jean Morisse, Histoire de Monfort en Fezensaguet, Bastide d’Armagnac, Imp. Cocharaux,1963.