Selon la définition du littré, le fief tire son origine du Moyen-âge. « Domaine noble, relevant du seigneur d’un autre domaine, concédé à des roturiers, sous condition de foi et hommage et assujetti à certains services et à certaines redevances« .

Les archives départementales du Gers à Auch détiennent quelques document intitulés « Sénéchaussée de Lectoure – Reconnaissance fournies au domaine des biens relevant du Roi, dans la juridiction de Monfort (Vicomté de Fezensaguet) » (1)

Les notabilités bien connues de Monfort reconnaissent tenir en fief des parcelles de terrain qui dépendent d’un seigneur comme celui de Canet, Las Laques et Esparbès. Ces trois seigneurs touchent une redevance de 6 liards par concade. Le texte retrouvé aux archives reprend ces trois seigneuries.

La directe de Canet

Le seigneur de Canet en 1668 est le sieur de Rouquette. Nous ne savons pas de qui ce dernier a hérité cette seigneurie mais Canet a appartenu à plusieurs personnages, dont les Saluste, au cours des siècles comme en témoigne un article que j’ai écrit en son temps.

Le 18 juin 1668 ont comparu les héritiers de Jacques Broqueville lesquels ont reconnu tenir en fief savoir terre et vigne lieu dit A Capdemail confronté du levant passage de service et terre de Guillaume Saint-Martin, midi vigne de Jacques Broqueville, couchant terre de Dominique Guibaille, septentrion chemin public et vigne de Dominique Broqueville.

Je m’arrête un instant à ce Jacques. Du XVIIe siècle, nous n’avons qu’un seul Jacques dans la généalogie. Il s’agit de Jacques fils d’Andrieu (+1653) et de Andriane Roux. Jacques a épousé Jeanne Roux le 9 février 1655. Il serait mort entre 1694 et 1695. Or nous avons ici Jacques Broqueville dont le texte signale que ce sont les héritiers qui tiennent en fief une terre et une vigne au lieu-dit Capdemaille. Qui dit héritiers dit décès. Donc ce Jacques est un autre non identifié. Nous allons voir par la suite qu’il y a bien un Jacques qui est vivant et peigneur de laine.

Dans la directe de Canet, Maître Bertrand Lauzéro avocat au Parlement de Toulouse tient en fief énormément de terre de toute nature. Bertrand est le petit-fils de François et de Blasie Broqueville d’Empiroy. Nous n’allons pas énumérer tant il a de terre à cet endroit. (2)

Jacques Broqueville peigneur de laine tient en fief une terre à Capdemaille notamment Contrairement au premier Jacques, ce dernier est plus riche car il tient plus de terre en fief dans la directe de Canet. Il possède une terre à la rieu d’En Rousseau (3). Jacques possède une autre terre A Salivan, etc. (4)

La directe de Las Laques

Pour ce qui est de Las Laques, je n’arrive pas à identifier le nom du seigneur de ce lieu-dit. Sa signature est parfaitement illisible. La directe de Las Laques comporte 129 concades, ce qui est largement moins que la directe de Canet qui en compte 359. Par contre, celle d’Esparbès remporte le pompon avec ses 594 concades.

Le chirurgien Barthélemy Broqueville tient en fief une terre à Saint Blaise. (5). Les héritiers de Janotet ont aussi une terre à La Serine. (6). A côté de cette pièce de terre, les héritiers de Bernard tiennent en fief une autre terre à Saint-Blaise. (7) Jacques Broqueville tient aussi une terre à Cabanac. (8)

« A comparu Jean Broqueville sieur d’Endardé lequel reconnaît tenir en fief savoir la métairie, passade, jardins, verger, terre, vigne au lieu-dit En Dardé« . Cette métairie fait donc partie du fief de Las Laques. On aurait pu imaginer qu’elle appartenait à Esparbès, mais il n’en est rien. On voit la signature de Jean à laquelle il rajoute le terme de « feudataire ». (9)

Ce terme est intéressant car il souligne ainsi qu’il est titulaire d’un fief, c’est-à-dire qu’il en est le propriétaire. dépendant à ce titre d’un suzerain. Tout feudataire pouvait prendre les armes contre son seigneur pour déni de justice, ou pour vengeance de famille. A ce titre, il est dépendant de son suzerain. Voilà une information importante à propos de Jean Broqueville qui se dit sieur d’Endardé et non pas seigneur d’Endardé. Du fait qu’elle soit dans la directe de Las Laques, cette terre est noble. L’origine de la « noblesse de la famille » (10) en ces temps anciens (1668) provient peut-être de la possession du fief d’Endardé.

La directe d’Esparbès

Les héritiers de Janotet Broqueville tiennent en fief terre au lieu-dit Au Capoudat confronté du levant terre de Sernin Carrette, midi terre de Jean Broqueville Dardé contenant 16 places à 6 liard la concade. (11)

La directe d’Esparbès appartient au seigneur d’Esparbès qui signe ainsi. A l’époque les seigneurs d’Esparbès est un couple en la personne de Jean de Vigier marié à Suzanne de Rey. La seigneurie d’Esparbès arrive dans les mains de la famille Vigier via Suzanne. Suzanne est la fille du couple Étienne de Rey (1570-1621) et de Marie Saluste du Bartas (1584-1648). Cette dernière est la fille du poète Guillaume du Bartas (1544-1590) et de Catherine de Manas (1552-1612). Suzanne de Rey est donc la petite-fille de Bertrande Broqueville.

Ensuite viennent les terres de Jean Broqueville, fils de Jean feudataire. Ces terres se répartissent dans la métairie de Nagudet. Il possède aussi une terre le long du « canal de l’Arratz » d’au moins une concade. (12)

En conclusion

Comme nous l’avons vu, les Broqueville possèdent des terres en fief à Monfort. Comme nous n’avons pas de documents concernant d’autres lieux, nous avons du mal à déterminer l’ensemble de leurs possessions. Ici, il s’agit évidemment uniquement de celles qu’ils tiennent en fief. Nous avons vu que pour finir, c’est Jacques Broqueville, peigneur de laine, qui en possède le plus. Des textes comme celui-ci nous apporte aussi leur lot de surprises comme le fait de connaître un nouveau Jacques non attribué et que la terre d’Endardé est une terre noble dépendante de Las Laques. La généalogie avance petit à petit…

Géry de Broqueville

  1. Ces documents non reliés pour certains portent la côte A33.
  2. Il est possible de les consulter en cliquant sur le pdf ci-joint (25572-25576)
  3. La rieu d’en Rousseau. Deux lignes plus loin, il est inscrit le ruisseau d’en Rousseau. Le notaire a utilisé un mot en vieux français. Le terme Rieu se trouve encore en Wallonie pour indiquer effectivement un petit ruisseau comme le Rieu d’Amour situé dans le domaine de Beloeil, en Belgique.
  4. On y voit des terres essentiellement A Salivan qui font tout de même plusieurs concade au total. (25781-25784)
  5. Le fief concernant Barthélémy Broqueville (25786-25771).
  6. Terre concernent les héritiers de Janotet Broqueville (25788)
  7. Document montrant que les héritiers de Bernard tiennent une terre en fief. (25789)
  8. Il s’agit de Jacques peigneur de laine (25790-25791)
  9. La terre d’Endardé est une terre noble parce qu’appartenant à la seigneurie de Las Laque. (25792). Jean Broqueville d’Endardé possèdent des terres aussi à Bajonnette.
  10. En réalité, ma famille n’a jamais été noble en France, bien qu’elle ait fait de belles alliances et qu’elle s’est octroyée au XVIIIe siècle le titre de comte avec manteau d’hermine !
  11. Terres des héritiers de Janotet Broqueville (25794-25795).
  12. Terres de Jean Broqueville fils du feudataire. (25796-25797)