Agnès de Broqueville (1799-1880) aura écrit au cours de sa vie pas moins de sept testaments, tous en possession du notaire Dufrêche de Monfort (1). Ce sont ces documents qui sont remis au tribunal de Lectoure pour vérification. Le tribunal a levé les scellées apposées sur la porte de la maison d’Agnès. Le greffier a découvert les 6 documents dans les papiers de la succession.
Agnès est la dernière Broqueville de la branche des Endardé présents à Monfort. Elle est la fille de Jean Joseph Bernard (1755-1834) et de Ursule de Lherm de Larcène (1752-1817). Agnès a vu la mort de ses 12 frères et sœurs entre 1807 et 1873.
Le testament de 1834
Le premier testament est daté du 17 août 1834. Il est intitulé ainsi : « Tout ce qu’une sœur reconnaissante et qui sait apprécié le mérite dont a un frère plein de sentiments nobles et délicats, de religion et d’affection bien entendues pour les siens, le le dois à mon excellent frère François Marie Charles Hubert de Broqueville qui n’a cessé de me donner toutes espèces de preuves du plus véritables intérêts. C’est donc pour donner à mon seul dit frère François Marie Charles Hubert de Broqueville une preuve quoique bien faible de ma gratitude que je veux et entendu qu’après ma mort, il soit mon héritier général et universel. En conséquence je lui donne et lègue tous mes biens présents et avenir. Mais je veux et et ?? que ma sœur Louise Anastasie soit jouissante sa vie durant de tous mes dits biens présents. J’oblige mes héritiers à me faire dire 100 francs de messes le plus tôt possible après mon décès. Telles sont les expressions de mes dernières volontés que je veux et expressément être exécutés et de j’ai fait et légué de ma main à Monfort ce 17 août 1834. Signé Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville« .
Nous ne connaissions pas la date de la mort de Louise-Placide de Broqueville sœur aînée d’Agnès. Elle était née le 28 mars 1781. Comme Agnès ne la cite pas dans ce premier testament, il est raisonnable d’imaginer qu’elle soit décédée avant 1834, d’autant qu’Agnès est très « famille » et tient à citer les membres de sa fratrie, encore vivants. Au travers de ce testament est noté la phrase : « Pour mon excellent frère Charles et mon excellente sœur Anastasie« .
Le testament de 1839
Le 4 mars 1839, Agnès écrit un codicille : « Je donne et lègue à mon frère François Marie Charles Hubert de Broqueville les 6000 francs qui me sont échût de la succession de Monsieur Louis de Broqueville de Colomé, mon oncle. Comme tout les miens sont dans mon cœur, Je voudrais être dans ma situation de fortune qui me permet de leur en donner d’amples preuves que je suis surtout bien vivement tombée des excellentes dispositions de mon cher frère en conséquence je veux et entend que mon susdit frère lui fasse pour moi un cadeau de 1000 francs dans l’année de mon décès si les 6000 francs ont été touchés. Je veux et entend également qu’il soit fait un cadeau de 100 francs à chacun de mes autres frères, Jean-François, Thomas-Laurent et Louis- Marie de Broqueville. Je veux de plus qu’il soit employé 100 francs aux bonnes œuvres dont je laisse la charge à mon héritier et finalement je veux et entend que ma sœur Louise Anastasie soit jouissante sa vie durant de l’entièreté des 4600 francs restants dont la propriété restera à mon frère Charles. Signé par Agnès. »
L’oncle de Agnès est Louis de Broqueville de Colomé (1752-1837). Louis est mort célibataire. Fils de Jean-Baptiste (1689-1771) et de Marguerite de Fraisse (+ av. 1783). Comme il a donné à sa nièce, Agnès, 6000 francs, il est potentiellement facile d’imaginer sa fortune pour l’époque. Il est probable qu’Agnès n’était pas la seule à hériter de cet oncle.
Les frères encore en vie était Jean-François (1780-1873), Thomas-Laurent (1782-1852), Louis-Marie (1784-1864).
Le testament de 1845
Le troisième testament connu est daté du 9 février 1868 et annonce un testament intermédiaire qui semble perdu. Il est libellé ainsi : « Moi Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville déclare par mon testament du 14 juillet 1861 institue mon frère François Marie Charles Hubert de Broqueville mon héritier général et universel. Comme il pouvait arriver que la mort de mon cher frère arriva avant mon décès et qui ne pouvait pas se faire selon les disposition testamentaires, je déclare que je veux et autorise son fils Stanislas Joseph Marie Antoine de Broqueville soit mon héritier général et universel, en conséquence je lui donne et lègue tous mes biens présents et avenir aux même closes et charges conte u dans mon testament fait en faveur de son père dont j’ai parlé plus haut. Je fais par la présente disposition par l’entière confiance que j’ai en cet enfant se conduise d’une manière noble et sera toujours guidés par les préceptes chrétiens qui portent ?? de bien à faire un bon ?? des misérables ??. Je donne à Pauline de Broqueville ma nièce la petite montre que ma légué sa digne mère dont le souvenir si chère jusqu’à mon dernier soupir. Fait à Monfort le 2 mai 1845. Signé Agnès de Broqueville« .
En réalité Agnès a fait 6 testaments puisqu’elle y signale qu’elle a écrit un autre testament le 14 juillet 1861 confirmant bien que son héritier général et universel était son frère Charles-Hubert. Visiblement Agnès se rend compte que son frère tant adoré va probablement mourir avant elle, elle prend des disposition pour que ce soit son fils, Stanislas qui hérite. Effectivement, Charles Hubert décède en 1871.
Il est à remarquer qu’Agnès a reçu un gage d’amitié d’Élisabeth de Robiano par le leg d’une montre. Cette dernière veut que ce bijou de famille Robiano ou le Candèle revienne à sa nièce Pauline, sœur de Stanislas. Visiblement, Agnès n’est pas au courant du décès de Marie-Pauline. Nous sommes en 1868 et Pauline est décédée en 1853 ! Elle confirme ce leg dans le testament suivant.
Le testament de 1853
Le quatre janvier 1853 Agnès écrit un autre testament. « Au nom de la très sainte trinité, un seul Dieu en trois personnes et pour sa plus grande gloire et celle de la très sainte vierge Marie sous les protections de laquelle je désire vivre et mourir, et sous celles de mon ange gardien et de ma sainte patronne, comme je crois prudent de prévenir le moment si incertain de la mort et exprimer ici l’expression de mes dernières volontés, j’institue pour mon héritier général et universel mon neveu Stanislas Marie Joseph Antoine de Broqueville et en conséquence, je lui donne , lègue et laisse tous mes biens meubles et immeubles présents et avenir en propriété mais je veux et entend que son père François Marie Charles Hubert de Broqueville mon frère et ?? et un usufruit ou jouissance sa vie durant tous mes susdits biens meubles et immeuble le tout sans être tenu à aucun inventaire ni à rendre aucun compte comme la maison que j’habite avec mon susdit frère fait partie de ma ??. Je veux et entend que cette maison ne soient jamais vendues ni donnée à aucun particulier quelconque sans entrave interdire le droit de la louer ou de la donner quelques autres destinations bien entendu que ce ne fut que pour quelques choses de religieux. Je veux que mon héritier fasse dire dans l’église de Monfort 200 francs de messes dans l’année de mon décès, je veux aussi qu’il donne une somme de 1000 francs pour faire livrer une ?? le plus tôt possible après ma mort devant laquelle on fera prier pour moi et mes si regrettés parents. J’entends que cette messe ?? soient prestées dans l’église de Monfort. Je veux encore qu’il soit donné 300 francs au bureau des pauvres de Monfort. Je veux que l’on donne pour la même destination un lit complet pris dans ce que j’ai de moindre valeur mais avec couette et matelas, deux paires de draps de lit des domestiques et six gros linges et tout ce qu’il y aura de meilleur dans mon linge de corps. Je prie mon frère charger de faire un petit cadeau à ceux de mes frères qui me survivront comme preuve de mon amitié et aussi à sa chère fille, Marie-Pauline de rendre à celle-ci la montre que me légua sa mère par son testament, comme gage d’amitié. Je laisse à mon neveu, Louis fils à mon frère aîné la somme de 500 francs, une somme de 100 francs à chacun des fils de feu ma chère tante Joséphine de Broqueville épouse Dupuy, au cadet ce sera 200 au lieu de 100 francs. Telles sont les ?? de mes dernières volontés que j’ai faite. Signé Agnès de Broqueville.«
Le testament de 1869-1870
En entête sur cette feuille se trouve les lettres J.M.J. et une croix et commence ainsi : « Au nom de la très sainte trinité, un seul Dieu en trois personnes. Et se termine Fait à Monfort le 9 février 1869, avec la signature de Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville« . Ce texte est suivi par une mention manuscrite : « Ce 19 septembre 1870, je déclare annuler par la présente et finit par fait et signé à Monfort par Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville. »
Le testament de 1871
Il commence ainsi « Moi Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville, au nom de la très sainte trinité et se termine par « Fait à Monfort et dans ma maison le 5 juin 1871 et en dessous se trouve la signature de Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville en deux exemplaires. En dessous il est noté « Je déclare avoir signé deux fois » Le texte se termine par cette phrase : « Ce sont mes vœux et souhaits bien ardents et que nous nous trouvions réunis dans le sein paternel de Dieu« . Dans la marge, se trouve la mention : « Je déclare ici que si mon neveu et héritier venait à mourir, je veux veux et entends que son fils Charles de Broqueville, mon filleul, soit mon héritier général à la place de son père. Fait à Monfort le 17 mai 1878 – Signé Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville. En marge aussi ce message : « J’ai annulé la clause du legs pour Ernest Dupuy mon neveu pour la raison aussi que j’ai compris qu’il en faisait bonne provision étant au service – Agnès de Broqueville tout pour qu’il ne méconnaisse pas mes vrais sentiments d’affection« . Comme ce testament fait 4 pages, dans la marge de la 3e page est écrit ceci : « Pour éviter tout embarras » et se terminant par : » Je révoque et annule tout autre testament que je puis avoir fait« .
Le testament de 1880
Enfin nous arrivons au dernier testament qu’elle écrit le 15 avril. Il est clair que ses jours déclinent. Bien qu’elle se dise en bonne santé, son écriture et ses répétitions indiquent qu’elle n’est plus en bonne santé. Je retranscris tel quel . « Moi Charlotte Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville de Broqueville certifie et déclare en parfaite liberté d’esprit à la même dacte [date], après m’être misse [mise] en la présence de la très sainte trinité, sous la protection de la très sainte vierge, mère de Dieu et de ma sainte Agnès, ma patronne, je veux exprimer mes dispositions de dernières volontés et ordonne mon testament en ces termes. J’institue pour mon héritier général et universel mon si digne neveu le baron Stanislas Marie Joseph Antoine de Broqueville, habitant du château de Postel, province de la Campine en Belgique, fils à monsieur, mon frère, François Marie [Charles Hubert] de Broqueville, quand vivant, ancien lieutenant d’infanterie qui depuis qu’il m’avais présentée aux sacré jour du baptême avait été pour moi comme le meilleure des père ; en conséquence je nomme le plus aimé plus haut Joseph Marie Antoine baron de Broqueville mon neveu mon héritier général et universel et lui donne lègue et laisse tous mes biens présents et avenir et généralement tout ce que je possèderai à mon décès : argent comptant, titre de créances, la maison que j’habite et lui fait avec sa ?? avec qui ?? mon décès l’obligation de ne jamais les vendre pour souvenir de la famille, je lui exprime aussi le désir qu’il peut la faire habiter plus tard par un de ses enfants garçon ou fille. J’oblige aussi mon dit héritier à faire dire 300 messes, de suite après mon décès pour moi et mes si chers parents, de faire saluer ?? ?? ici le bout du mois et l’année sain de mon ?? et lègué par moi. Et entériné mon testament avec d’autre par Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville, j’oblige aussi mon héritier à à compter une somme de 200 francs à l’église de la Motte comme ?? près de Mauvezin à la condition qu’il sera dit chaque année une messe pour le repos de l’âme de ma très regrettée mère. Je donne une rente de 20 francs par an à la chapelle de l’archi-confrérie du Saint cœur de Marie dont j’ai une ?? pour l’entretien à la condition qu’il sera dit une messe basse tous pour moi à la dite chapelle le jour de ma mort et cela qui durera comme la rente unique (un trait) pour expliquer une volonté qui m’a été expliquée par mon frère Charles de mon vivant, j’oblige mon héritier à payer à la Fabrique de l’église de Monfort une somme de 50 francs tous les ans à perpétuité, 35 francs pour son compte et une pareille pareille de 50 francs aussi pour lui et pour moi au bureau des pauvres de Monfort, 35 francs pour mon frère Charles et 15 pour mon compte. Pour le don à la fabrique à la condition que la dite fabrique fera dire une messe basse tous les ans les 17 janvier jour de la mort de mon si cher frère Charles, en la faisant sonner avec la petite cloque. Je fais aussi don d’une rente de 10 francs à la chapelle Saint-Jean Baptiste, une rente de 10 francs par an comme la sépulture de nos ancêtres, mon grand-père Jean-Baptiste de Broqueville, le dernier qui a été enseveli. Fait et légué de ma main et dans ma maison le 15 avril 1880. Signature Charlotte Josèphe Agnès de Broqueville« .
En conclusion…
Ne faites jamais de testaments trop tôt dans la vie. Au fur et à mesure que les héritiers disparaissent avant votre décès, il faut recommencer à écrire un nouveau testament. C’est ce qui est arrivé à Agnès. Celle-ci écrit son premier testament quand elle est âgée de 35 ans. Elle a probablement été fortement marquée par le décès, le 12 août, de son père Jean Joseph Bernard. En tout cas, il est clair, déjà, qu’elle a déjà choisi pour héritier universel, Charles Hubert de Broqueville son frère chéri. Plus d’une fois, elle répète dans les différents testaments que ce frère est bien celui qu’elle préfère. Bien que de temps en temps, elle veut rester juste avec les autres membres de la fratrie leurs léguant 100 francs. Elle n’oublie pas sa sœur Louise-Anastasie (1792-1841). Elle n’oublie pas de rendre hommage aussi à sa mère qui est décédée à Mauvezin, au Salpinson. Dans le dernier testament, nous savons qu’elle est enterrée dans le cimetière de l’église de Lamothe près de Mauvezin (2). C’est une nouvelle information que nous n’avions pas. Ainsi donc, Le corps d’Ursule de Lherm de Larcène se situe entre Monfort et Saint-Sauvy, son village natal.
Il y a aussi une autre question qui me taraudait l’esprit depuis longtemps. Qui est enterré dans le cimetière de Monfort ? Je vous laisse deviner, du moins pour les lecteurs familiaux. Ce sera l’objet de l’article suivant. Je reprendrai l’intégralité des habitants du caveau de Monfort.
Géry de Broqueville
(1) Notaire Dufrèche côte 3E17741 aux Archives départementales du Gers à Auch. (25714-25748)
(2) Les coordonnées de l’église de Lamothe sont 43° 44′ 38″ nord, 0° 50′ 35″ est. Ce village est situé à 8,6 km de Monfort, à 9,6 de Saint-Sauvy et à 3 km de Mauvezin. Selon le site Internet de