A l’heure où j’écris ce « papier » comme l’on disait dans les temps où Internet n’existait pas, plus que jamais, la communauté des humains parlent de recyclage, de seconde main, de redonner vie aux objets, de recyclerie, de repair’café… Bref de réutilisation de supports intéressants pour continuer à développer des objets usuels.
La notion de récupération a existé de tout temps sauf peut-être dans la seconde moitié du XXe siècle où l’on imaginait une croissance économique à tout crin, sans se soucier des pollutions environnementales. S’il fallait abattre des forêts entières pour produire du papier, cela ne semblait pas grave. L’on ne replantait des arbres que par intérêt économique tant l »Homme pensait que la nature était inépuisable… et à son service. L’Homme oubliait trop vite que le nombre d’habitants de la planète bleue, ne faisait que croître.
Ainsi lorsque je suis né, il y avait 2,5 milliards d’habitants. En 1674, il y avait un peu moins de 600 millions d’habitants dont à peu près 21 millions vivants en France (actuellement 65 millions). Pourquoi donner ces chiffres ? Parce qu’il me semble qu’il est important de relier le passé au présent puisque nous sommes dans un élan solidaire type mouton de Panurge où l’ensemble des humains se précipite avec enthousiasme vers la fin d’un monde.
Ponsin fait de la récup’
1 sol la feuille !
En janvier 1674, le notaire Ponsin fait de la récupération de papier qu’il a sous la main. C’est la première fois que je nous voyons un papier imprimé « Ressort du parlement de Tolose » (Toulouse) et l’on voit même que ce papier sert pour les « contracts et actes des notaires » cela coûte quand même 12 deniers la feuilles, ce qui est extrêmement onéreux pour l’époque. Bien sûr ce n’est pas le notaire Ponsin qui l’a payé, il n’en a pas les moyens. Ce papier égaré provient en surplus d’actes non écrits par des notaires de la ville de Toulouse. Comme on peut le voir sur la photo ci-contre certains papier coutaient largement moins chers.
Dans d »autres actes, nous avons vu des papiers en provenance d’autres ville comme celles de Lectoure mais aussi de Montauban. Ces derniers papiers valaient nettement moins chers et se chiffraient en sou. Le papier coutait cher à l’époque, c’est ainsi que certains notaires récupéraient tout ce qui pouvait servir de support pour écrire des actes. Or l’on voit aussi dans certains registres des pages blanches entières non utilisées ! Mais ces pages se trouvaient en fin de registre là où les yeux ne se déposaient plus pour de longs siècles.
Voilà donc, comment un titre peut me faire philosopher sur l’avenir de notre monde, au petit matin de ce jour. Que voulez-vous ma formation de philosophe sommeille en moi… elle est aussi forte que celui de l’historien qui essaie de comprendre notre monde actuel baigné de tant d’incertitudes !
C’est avec ces pensées positives- puisque je rends hommage au notaire Ponsin de sa capacité de recyclage des papiers pour écrire des actes notariés – que je souhaite à toutes et tous, une excellentes année 2020.
Géry de Broqueville
(1) Notaire Ponsin, côte 3E8983 aux Archives départementales du Gers à Auch.
A l’heure où vous lirez ce texte, je suis revenu de la ville d’Auch où j’ai passé 4 jours héroïques tant j’ai bu la coupe jusqu’à la lie. Non point parce que les Archives départementales ne m’ont pas fait bon accueil. Loin de là. J’ai abordé deux siècles, ce que je refusais de faire, jusqu’ici tant la forme d’écriture est différente.
Je me suis donc attelé à la lecture des notaires monfortois du XVe et XVIe siècle. Par le passé j’avais bien fait quelques incursions pour retrouver notament le testament de Santina Marcassus épouse d’un Jean Broqueville. Mais je n’étais pas aller plus loin. C’est d’ailleurs à ce moment là que j’ai découvert l’évolution du patronyme Broqueville.
Dans ma liste des notaires à visiter, j’ai abordé maître de Culheux qui a officié à Monfort entre 1544 et 1604 environ. C’est là que j’ai cru devenir fou. Oui, j’ai vraiment bu la coupe jusqu’à la lie ! Sur plusieurs centaines de page à lire, je n’ai vu que de très rares pages consacrées aux Broqueville et aux Saluste. Et encore, là où j’ai découvert avec satisfaction quelques textes sur ma famille, c’est sur un cahier égaré du notaire Lauzéro daté de 1601 ! J’ai senti monté en moi un ras le bol de ce notaire tant son écriture est épouvantable et donc extrêmement difficile à lire.
J’ai abordé aussi le notaire Antoine Arnaud qui ne m’a rien apporté du tout. Rien du tout, pas un texte ! De manière étonnante, j’en ai eu moins sur la patate tant son écriture était plus facile à lire. A certains moments, j’avais plaisir à lire ses textes avec une si jolie écriture. Ce notaire aborde les années 1553 à 1566.
J’ai continué avec le notaire de Bosquéry. J’avais déjà découvert qu’il était intéressant par le passé puisque j’y ai retrouvé des Broqueville dans un registre entre 1506 et 1517, une autre de 1521 et un troisième de 1554. C’est dans ce dernier recueil que l’on trouve le testament de Santina Marcassus. Il fallait donc s’attaquer aux périodes plus anciennes en sachant que je trouve certainement face à deux Bosquéry, pe père et le fils. Le registre le plus ancien remonte à 1478 ! Je me suis donc plongé dans la lecture de ces documents qui ont quand même 541 ans !
Brocavilla, brocouile, Brocqueville, Broqueville
Jean Morisse, dans la première édition de son livre sur l’histoire de Monfort datant de 1965, avait déjà supputer que le patronyme Broqueville s’écrivait autrement. Il s’était arrêté à la lecture du notaire de Culheux qui écrivait notre patronyme avec un « c » sans le « qu » ne pouvait être lu que Brocouille ! Si cela a bien fait rire feu Jean Morisse, la famille Broqueville a plutôt grincé des dents ! C’est ainsi que le paragraphe concernant l’assertion « Brocouille » a disparu de la réédition dans les années 90.
L’affirmation de Jean Morisse était un peu facile d’autant qu’il a eu accès aux mêmes documents que moi, c’est à dire à ceux du notaire de Bosquéry et qui donne pour nom « Brocavilla ». C’est bien de la même façon que les deux notaires écrivent le patronyme Broqueville d’autant que leurs textes sont intégralement rédigé en latin, bien que les titres des actes soient en français !
On voit d’ailleurs le notaire de Culheux écrire quand même le patronyme avec un « q » une ou deux fois. D’ailleurs au XVIIe siècle, Les Broqueville oscilleront, eux-mêmes, entre des signatures avec un « c » avant le « q » ou sans le « c ». Cette dernière lettre est donc un vieux reste de la traduction latine du patronyme. Dans les textes plus anciens, mes yeux se sont habitués à regarder les deux écritures. C’est ainsi que le Broqueville le plus ancien que j’ai repéré est Johannes Brocavilla dans un texte du notaire de Bosquéry, daté de 1480 ! (1)
Maintenant, il me reste a essayer de déchiffrer tous ces textes qui me fera peut-être avancer sur la connaissance des Broqueville des XV et XVIe siècle. Quand je vois des patronymes monfortois comme Gariépuy, Marcassus, Dat, Montaubric, Saluste, Silhère, Manas (Homps), Preissac (Esclignac) à profusion dans les registres du notaire de Bosquéry, je commence à me demander si le patronyme « Brocavilla » ne devrait pas être recherché du coté de Toulouse, Foix ou autres lieux. Mais contentons-nous de continuer inlassablement la lecture des notaires comme Daguzan, Armandy, Sabathier, de ces siècles reculés tant il y a probablement de bonnes informations à recueillir.
En ce qui concerne la récolte des informations concernant ces notaires des temps lointains, elle est terminée. Il me faudra encore remonter dans le temps, fin XVIIIe et XIXe pour compléter mes connaissances sur la famille. Ces lectures seront plus faciles au vu des calligraphies de ces deux siècles. Ce sera pour l’année prochaine.
Géry de Broqueville
(1) j’avais déjà relevé cette question de Brocavilla dans un autre texte déjà écrit en ces pages. Autant le relire aussi. J’ai écrit ce texte dans la cadre du testament de François Saluste.
Puisque j’arrive vers la fin de la lecture du notaire Mazars, je me rends compte combien les notaires nous font visiter Monfort. Certes le notaire n’est pas un guide du tourisme local, mais nous découvrons à chaque fois des lieux différents.
Somme toute, il est rare qu’un notaire donne rendez-vous dans sa boutique, tant on le voit voyager de maison en maison, de lieux publics en lieux privés, au détour d’une route, souvent dans un de ces lieux-dits qui me sont si chers, connus ou disparus.
Dans la ville
Dans la ville de Monfort, le notaire officie sous la garlande de la place, ce qui signifie sous les arcades, l’on ne sait si c’est du coté de l’actuelle « Grignotière » ou si c’est le coté qui lui fait face, du coté de l’épicerie. Très souvent les rencontres se font sous la salle commune située dans la halle de Monfort. La salle commune est donc un bâtiment qui a disparu probablement depuis bien longtemps. Dernièrement j’avais repéré le trépoir (1). Il est le premier palier d’un escalier à l’extérieur du bâtiment avant d’accéder à l’intérieur de celui-ci. Le notaire officiait sur le trépoir de la salle commune.
Sur la place, il reste l’église paroissiale où les notaires officient, devant sur la rue, dans le porche, dans la chapelle Saint-Jean ou celle de Notre-Dame du Rosaire. C’est grâce aux testaments que l’on connaît les lieux de sépulture des bourgeois et autres notables de Monfort. Si l’on foule le porche de Monfort, il devrait y avoir encore bon nombre de squelettes enfouis à cet endroit, à moins que la pioche iconoclaste de quelques révolutionnaires ait tout nettoyé !
Dans le reste de la bastide, on peut passer de la maison de Jean Broqueville à celle de janotet ou de Joseph et de leurs descendants. Les branches alliées ne sont pas en reste, comme les Lauzéro qui accèdent à des hautes fonctions comme procureur du roi au parlement de Toulouse. Cette dernière fonction est remplie par Raymond Lauzéro dont Jean Broqueville en est le substitut pour Monfort. Dans les maisons, on y passe généralement des pactes de mariage ou des testaments. Certaines rencontres se déroulent sous les remparts de la ville ou au lavoir.
Les lieux-dits en dehors de la bastide
Le notaire rend visite dans les maisons des uns et des autres dans les lieux-dits comme Esparbès, Endardé, Las Laques, Bigourdas, Empiroy, Maussombat. Les notaires officient toujours pour les testaments quand les personnes sont clouées dans leurs lits pour cause de maladies corporelles ou quand la personne sent sa fin proche. Un notaire s’est même placé devant la maison pour recueillir le testament d’une pestiférée au milieu du siècle.
Tout cela ne sont que des lieux précis qui ne donnent généralement pas d’informations précises. L’annonce d’un lieu est une indication sèche. Comme on l’a déjà vu dans le terrier de Monfort, il est très difficile d’identifier les lieux exacts des propriétés qui ne se font en référence non pas à des parcelles cadastrales que l’on découvre sur les plans napoléoniens, mais bien par la présence d’autres terres situées aux quatre points cardinaux de celle décrite.
Même si ce n’était pas le fait d’un notaire, une suite de témoignages avait donné beaucoup d’informations et de description sur Monfort et ses habitants, mais là, on était au XVIIIe siècle. Nous pourrions presque remercier Catherine Druilhet d’avoir injurié les Broqueville tant les témoignages sont une belle toile de Watteau réalisée à Monfort.
Géry de Broqueville
(1) Pour rappel, les explications sont données à propos de ces mots apparaissant dans les textes, dans le dico.
Une remarquable campagne de sensibilisation a lieu en Belgique organisée par le WWF : comparer les familles humaines à celle de la famille des tigres. Sommes nous en voie d’extinction ou de d’expansion ? Si vous êtes belge vous pouvez faire le test avec votre nom. Si vous ne l’êtes pas regardez la vidéo du WWF et méditez sur ces magnifiques images : http://sauvezletigre.tx2.be/
En tout cas, aux yeux du Service population du gouvernement belge, les Broqueville sont en voie d’extinction puisqu’il ne reste plus que 77 individus vivant en Belgique. Mais ce petit programme ne tient pas compte de l’évolution du nom à travers les âges.
En réalité, et ce jusqu’à preuve du contraire, la famille Broqueville est en expansion. Nous sommes passés d’un individu en 1830, Stanislas (1830-1919) né à Ghyseghem (Alost) peu avant la révolution belge d’un père français, Charles Hubert (1785-1871) et d’une mère belge, Octavie le Candèle de Ghysegem (1803-1835). Nous sommes donc 77 individus porteur du patronyme Broqueville vivant en 2015.
Bien qu’il y ait encore des Broqueville en France (Nord-Pas-de-Calais, Saint-Quentin, Toulouse), rien ne prouve qu’ils sont issus d’un Broqueville français de notre famille dans des temps plus anciens. Et des Broqueville français, il n’y en a plus depuis 1895, sauf peut-être l’un ou l’autre qui aurait la double nationalité.
Ce sera dans les 10 ans à venir que l’on pourra dire si Broqueville est en expansion ou en extinction. Mais que ceci ne nous fasse pas oublier cette campagne du WWF à propos de la disparition des tigres dans le monde. Il ne faudrait pas voir les images affligeante à propos du dernier rhinocéros blanc du Kenya qui est protégé par des soldats, jour et nuit, contre les braconniers, sans scrupule.
Souvent je me demande comment nos ancêtres vivaient ce passage d’une année à l’autre. Si les annales de l’année 999 nous racontent les grandes peurs de l’année 1000, celles qui seront racontées dans quelques centaines d’années pourront rire en racontant le grand bug de l’an 2000 !
Mais quand même, le passage d’un 31 décembre à un premier janvier n’est nullement raconté dans les textes que je lis. Il semblerait que le passage d’une année à l’autre n’est pas marqué par un événement tant, peut-être, la vie devait être rude. (suite…)
A défaut d’avoir le portrait de Marian voici celui de Guillaume saluste (1).
La meilleure preuve est que je viens de faire un encodage dans ma base de données concernant la famille Saluste. Comme vous le savez probablement, si je m’intéresse à cette famille c’est parce que Bertrande Broqueville est la mère de Guillaume Saluste du Bartas (1544-1590) éminent poète de l’époque. Pour essayer de comprendre les relations de vie entre les personnes vivant dans Monfort, invariablement, on est appelé à découvrir l’environnement mais aussi l’entourage d’une même famille.
Il faut essayer de comprendre pourquoi Catherine de Manas épouse du poète Guillaume Saluste du Bartas, dans son testament, laisse à certains Broqueville, quelque argent, émues probablement par leur sort. Outre les liens de parenté parfois lointain, les gens se connaissent, se côtoient, surtout aussi parce qu’ils vivent, somme toute, dans une petite bastide du Fezensaguet. (suite…)